GRÉGORY : Tu es journaliste et directeurs de The Shift Project qui est un lien entre l’écologie et l’économie et qui essaye surtout de parler d’énergie. Est-ce que tu peux nous refaire un point rapide plus ou moins sur la consommation d’énergie en France ? Parce qu’on dit que le nucléaire, c’est une toute petite partie, mais c’est juste une partie qui n’est pas la majorité.
MATTHIEU : Oui, c’est grosso modo 17%. En fait, quand on débat sur l’énergie, on confond très souvent l’électricité et l’énergie. L’électricité, c’est un bout de l’énergie qu’on consomme. Dans un pays comme la France, c’est grosso modo 1/5 de toute l’énergie qu’on utilise pour faire tourner l’économie, les transports, l’industrie, etc. Donc, effectivement, 1/5 de l’énergie qu’on consomme dans un pays comme la France, c’est de l’électricité, et la plus grosse partie de cette électricité, c’est effectivement, en France, du nucléaire, mais il reste les autres 80% . Le plus gros problème de la transition énergétique, c’est celui de notre dépendance aux énergies fossiles, parce que c’est 80% qui reste. C’est pour beaucoup du pétrole et c’est pas mal de gaz naturel et encore un peu de charbon, mais on a tendance à focaliser systématiquement le débat énergétique comme étant un débat nucléaire, pour ou contre et pour ou contre les énergies renouvelables. En fait, il faut comprendre que d’une part c’est qu’une partie du problème et c’est un problème secondaire par rapport au problème qu’est le problème posé par le climat qui note celui de notre dépendance aux énergies fossiles. On est beaucoup plus dépendant des énergies fossiles en France aujourd’hui qu’on est dépendant du nucléaire.
GRÉGORY : Effectivement, les gens ne réalisent pas à quel point notre confort de vie, la manière dont on vit au quotidien, est lié à l’énergie. C’est-à-dire les routes, les chaussures, le transport, etc.
MATTHIEU : C’est quoi l’énergie ? L’Énergie en physique, puisque c’est d’abord une grandeur physique, c’est la capacité d’une chose à transformer l’état de choses autour d’elle, donc à déplacer évidemment, mais à réchauffer, à refroidir, à contracter, à expulser dès que tu as une transformation quelconque dans le monde physique, biologique ou minéral, il y a un flux d’énergie qui entre en jeu, nécessairement par définition. Donc on comprend que quand on parle de transition énergétique, on ne parle pas d’un petit sujet, on ne parle pas d’un sujet secondaire, on parle juste du système sanguin de notre société, ce qui permet de faire les choses ou ce qui nous interdit de les faire, physiquement, techniquement.
GRÉGORY : Aujourd’hui, tout le monde parle de cette transition écologique, de mon point de vue, je n’ai pas la sensation que ça bouge des masses quoi.
MATTHIEU : J’ai moi-même pagayé à contre-courant pendant de longues années jusqu’à 2018. Mais j’ai commencé à m’intéresser à ces sujets-là, vers la fin des années 90. Il aura fallu 20 ans pour qu’il y ait un consensus sur le diagnostic. C’est-à-dire que, globalement, la plupart des gens disent effectivement, on a des problèmes à résoudre, ceux qui le pensent pas ils sont ringardisés, tant pis pour eux. Donc, on est d’accord qu’il y a un diagnostic commun, mais maintenant, il faut commencer enfin la conversation sur la thérapie. Qu’est-ce qu’on fait ? Qu’est ce qu’on fait pour le climat ? Qu’est-ce qu’on fait pour la biodiversité ? Etc, etc. Mais au moins ça y est, la société est largement d’accord pour se dire ok, on a un gros problème, on a une grosse maladie là.
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