Vlan #129 Couple, sexe et confinement avec Alain Héril

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GRÉGORY : J’ai fait un épisode avec Esther Perel que vous connaissez bien sûr la relation amoureuse. Aujourd’hui, on se trouve dans une situation de confinement qui est quand même très particulière, et moi, il y a une information qui m’a marquée venant de Chine, c’était que suite au confinement, il y avait eu une hausse assez importante des divorces. Est-ce que le confinement, c’est un tue le couple ?

ALAIN : Le confinement n’est pas nécessairement un tue le couple. Il n’y a pas de rapport qui serait direct. Mais en même temps, je pense que le confinement a une fonction de révélation. Comme les anciens photo argentique, il y a quelque chose qui se révèle du couple, c’est-à-dire qu’il faut bien comprendre ce qu’était le couple avant le confinement et ce que le couple va révéler de son fonctionnement, parfois inconscient pendant le confinement. Je pense que les couples qui ont divorcé en Chine et qui peut être divorceront en France après le confinement, ce ne sont pas des couples qui divorcent à cause du confinement, ce sont des couples qui divorcent parce que le confinement révèle quelque chose qui était défectueux dans la relation avant même le confinement. Cette dimension de révélateur et me paraît extrêmement importante, c’est-à-dire que le confinement fait voir au couple, parfois de manière un peu crue, là où ils en sont réellement dans leur relation, et comme il n’y a plus l’activité professionnelle, voire la suractivité qui est là, et bien tout d’un coup, il y a une espèce de matière de révélation qui se met en place dans le couple et qui peut mettre des couples à mal, bien entendu. Mais évidemment qu’on peut avoir le contraire aussi. Il y a des couples dont l’amour va se révéler avec le confinement de façon positive, on va dire. À mon avis, c’est ça qui est en jeu, c’est comment le confinement oblige le couple à regarder réellement là où ils en sont et à comprendre bien sûr comment la relation s’organise et sur quel terreau la relation, elle se construit. 

GRÉGORY : Parce que le confinement, ce n’est pas une situation normale, ce n’est pas une situation de couple normal. On a tous besoin d’avoir un jardin secret, et quand on est, ce n’est pas le cas de la majorité des Français, mais c’est le cas de certains citadins, dans 40 mètres carrés ou 20 mètres carrés ou 30 mètres carrés à deux confinés, ça crée une situation qui peut être complexe en termes de promiscuité, non ?

ALAIN : C’est une situation qui est très complexe en termes de promiscuité, parce qu’évidemment, il y a la nécessité d’avoir un espace relationnel à deux dans des espaces qui sont parfois très petits. En même temps, il est nécessaire d’avoir un espace interne qui n’appartient qu’à soi-même. Pour que cet espace interne, cette intériorité, elle puisse exister, malgré la présence de l’autre, il faut avoir la capacité à s’isoler et justement à avoir ce jardin secret. Ce qui peut être compliqué, c’est que ça amène les couples à comprendre qu’avoir un jardin secret, ce n’est pas un endroit d’où on exclut l’autre, c’est un endroit à l’intérieur duquel on s’inclut soi-même. De comprendre comment ce jardin secret, quand on peut le garder, même dans un tout petit espace, ça permet au couple de continuer à exister et à bien exister, si je puis dire. Mais quand vous dites que c’est une nouvelle situation, moi j’aurais tendance à le ramener à une situation qui a un caractère traumatique. On est dans une espèce de traumatisme parce que c’est inattendu, parce que ce n’est pas prévu, parce qu’on n’a pas été préparé à ça. Ce traumatisme va entraîner des effets post-traumatiques d’une certaine manière, et qui obligent à un effort d’adaptation considérable et qu’on n’a peut-être pas l’habitude de faire dans l’espace relationnel du couple.

GRÉGORY : Je veux bien que vous reveniez sur cet espace à soi quand vous dites que cet espace, on est censé le trouver en nous même, j’aimerais bien que vous développiez parce que même pour moi, je n’arrive pas à saisir. 

ALAIN : Ce que j’entends par là, c’est que nous avons besoin d’avoir des pensées qui nous sont propres, nous avons besoin d’avoir des émotions qui nous sont propres et avant de les partager avec l’autre, on a besoin de les partager avec soi-même. Ça permet de comprendre qu’un couple ne fonctionne pas obligatoirement avec une dictature constante de la transparence. C’est-à-dire tout se dire au moment où ça a lieu, dévoiler ses émotions quand elles commencent à émerger, c’est ça, l’espace intérieur, c’est-à-dire avoir un temps d’intériorité où on se dit “là, qu’est-ce que je suis en train de ressentir ? Qu’est-ce qui se passe à l’intérieur de moi ? Pourquoi j’ai cette angoisse ? Pourquoi j’ai cette peur ? Pourquoi j’ai cette joie aussi qui est en train d’arriver ?”. C’est-à-dire avoir un moment d’introspection, sans que l’autre vienne nous questionner sûr qu’est ce qui se passe à l’intérieur de nous ou sans qu’on soit dans l’idée qu’il faut à tout prix lui rendre des comptes et à tout prix lui raconter tout ce qui se passe dans notre intériorité. C’est ça aussi, cet espace à soi et dans cet espace à soi, il y a des choses qui se vivent, qui se disent, qui se résolvent aussi de soi à soi. C’est de comprendre qu’un couple, bien entendu, c’est un moment de partage, mais un couple, c’est aussi comment ça permet des espaces à l’intérieur desquels chacun va avoir un moment où il a des comptes à rendre qu’à lui-même. J’espère être clair dans ce que je développe là, mais ce sont des choses qui sont vraiment fondamentales. C’est la question du jardin secret qui est un terme banal, c’est-à-dire que le jardin secret, il n’est pas obligé de le dévoiler constamment à l’autre. On peut le garder pour soi. C’est comment, dans ce moment de confinement, on accepte d’avoir à côté de soi quelqu’un qui ne nous dit pas tout. Quelqu’un qui garde des choses pour lui. Quelqu’un qui a des idées, des impressions, des sensations qu’il ne va pas forcément nous les délivrer au moment où ça a lieu. C’est ça qui met à mal certains couples, parce que c’est accepter que l’autre ne nous dise pas tout au moment où les choses ont lieu, alors qu’on est dans un même espace et parfois pour certains, un espace qui est configuré de manière très réduite et très restreinte.

La suite a écouté sur VLAN !

Description de l’épisode

Alain Héril est sexologue, psychanalyste, superviseurs de plusieurs thérapeutes et auteur. Son dernier livre a pour titre “l’Orgasme thérapeutique”, tout un programme 🙂

Mais avec Alain nous parlons de cette situation qui touche bientôt à sa fin pour sa première phase, à savoir, le confinement.

Cette situation sort de la normalité et elle a des conséquences sur les couples puisqu’elle agit sur nous tous individuellement (ou couple ou non).

Avec Alain nous discutons de cette période, de son implication sur nous et sur l’autre.

Nous répondons à des questions aussi simple que “comment gérer son jardin secret lorsque l’on est confiné?”, “comment bien finir une histoire pendant le confinement” mais aussi “comment bien la débuter?”.

Une discussion pratique pour nous tous qui sommes parfois perdus dans notre relation à nous même et dans notre relation à l’autre.

Aussi parce qu’évidemment, ce confinement fait remonter les angoisses chez tout.e.s bien sur.

Je vous souhaite une bonne écoute!

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Transcription partielle de l’épisode

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GRÉGORY : J’ai fait un épisode avec Esther Perel que vous connaissez bien sûr la relation amoureuse. Aujourd’hui, on se trouve dans une situation de confinement qui est quand même très particulière, et moi, il y a une information qui m’a marquée venant de Chine, c’était que suite au confinement, il y avait eu une hausse assez importante des divorces. Est-ce que le confinement, c’est un tue le couple ?

ALAIN : Le confinement n’est pas nécessairement un tue le couple. Il n’y a pas de rapport qui serait direct. Mais en même temps, je pense que le confinement a une fonction de révélation. Comme les anciens photo argentique, il y a quelque chose qui se révèle du couple, c’est-à-dire qu’il faut bien comprendre ce qu’était le couple avant le confinement et ce que le couple va révéler de son fonctionnement, parfois inconscient pendant le confinement. Je pense que les couples qui ont divorcé en Chine et qui peut être divorceront en France après le confinement, ce ne sont pas des couples qui divorcent à cause du confinement, ce sont des couples qui divorcent parce que le confinement révèle quelque chose qui était défectueux dans la relation avant même le confinement. Cette dimension de révélateur et me paraît extrêmement importante, c’est-à-dire que le confinement fait voir au couple, parfois de manière un peu crue, là où ils en sont réellement dans leur relation, et comme il n’y a plus l’activité professionnelle, voire la suractivité qui est là, et bien tout d’un coup, il y a une espèce de matière de révélation qui se met en place dans le couple et qui peut mettre des couples à mal, bien entendu. Mais évidemment qu’on peut avoir le contraire aussi. Il y a des couples dont l’amour va se révéler avec le confinement de façon positive, on va dire. À mon avis, c’est ça qui est en jeu, c’est comment le confinement oblige le couple à regarder réellement là où ils en sont et à comprendre bien sûr comment la relation s’organise et sur quel terreau la relation, elle se construit. 

GRÉGORY : Parce que le confinement, ce n’est pas une situation normale, ce n’est pas une situation de couple normal. On a tous besoin d’avoir un jardin secret, et quand on est, ce n’est pas le cas de la majorité des Français, mais c’est le cas de certains citadins, dans 40 mètres carrés ou 20 mètres carrés ou 30 mètres carrés à deux confinés, ça crée une situation qui peut être complexe en termes de promiscuité, non ?

ALAIN : C’est une situation qui est très complexe en termes de promiscuité, parce qu’évidemment, il y a la nécessité d’avoir un espace relationnel à deux dans des espaces qui sont parfois très petits. En même temps, il est nécessaire d’avoir un espace interne qui n’appartient qu’à soi-même. Pour que cet espace interne, cette intériorité, elle puisse exister, malgré la présence de l’autre, il faut avoir la capacité à s’isoler et justement à avoir ce jardin secret. Ce qui peut être compliqué, c’est que ça amène les couples à comprendre qu’avoir un jardin secret, ce n’est pas un endroit d’où on exclut l’autre, c’est un endroit à l’intérieur duquel on s’inclut soi-même. De comprendre comment ce jardin secret, quand on peut le garder, même dans un tout petit espace, ça permet au couple de continuer à exister et à bien exister, si je puis dire. Mais quand vous dites que c’est une nouvelle situation, moi j’aurais tendance à le ramener à une situation qui a un caractère traumatique. On est dans une espèce de traumatisme parce que c’est inattendu, parce que ce n’est pas prévu, parce qu’on n’a pas été préparé à ça. Ce traumatisme va entraîner des effets post-traumatiques d’une certaine manière, et qui obligent à un effort d’adaptation considérable et qu’on n’a peut-être pas l’habitude de faire dans l’espace relationnel du couple.

GRÉGORY : Je veux bien que vous reveniez sur cet espace à soi quand vous dites que cet espace, on est censé le trouver en nous même, j’aimerais bien que vous développiez parce que même pour moi, je n’arrive pas à saisir. 

ALAIN : Ce que j’entends par là, c’est que nous avons besoin d’avoir des pensées qui nous sont propres, nous avons besoin d’avoir des émotions qui nous sont propres et avant de les partager avec l’autre, on a besoin de les partager avec soi-même. Ça permet de comprendre qu’un couple ne fonctionne pas obligatoirement avec une dictature constante de la transparence. C’est-à-dire tout se dire au moment où ça a lieu, dévoiler ses émotions quand elles commencent à émerger, c’est ça, l’espace intérieur, c’est-à-dire avoir un temps d’intériorité où on se dit “là, qu’est-ce que je suis en train de ressentir ? Qu’est-ce qui se passe à l’intérieur de moi ? Pourquoi j’ai cette angoisse ? Pourquoi j’ai cette peur ? Pourquoi j’ai cette joie aussi qui est en train d’arriver ?”. C’est-à-dire avoir un moment d’introspection, sans que l’autre vienne nous questionner sûr qu’est ce qui se passe à l’intérieur de nous ou sans qu’on soit dans l’idée qu’il faut à tout prix lui rendre des comptes et à tout prix lui raconter tout ce qui se passe dans notre intériorité. C’est ça aussi, cet espace à soi et dans cet espace à soi, il y a des choses qui se vivent, qui se disent, qui se résolvent aussi de soi à soi. C’est de comprendre qu’un couple, bien entendu, c’est un moment de partage, mais un couple, c’est aussi comment ça permet des espaces à l’intérieur desquels chacun va avoir un moment où il a des comptes à rendre qu’à lui-même. J’espère être clair dans ce que je développe là, mais ce sont des choses qui sont vraiment fondamentales. C’est la question du jardin secret qui est un terme banal, c’est-à-dire que le jardin secret, il n’est pas obligé de le dévoiler constamment à l’autre. On peut le garder pour soi. C’est comment, dans ce moment de confinement, on accepte d’avoir à côté de soi quelqu’un qui ne nous dit pas tout. Quelqu’un qui garde des choses pour lui. Quelqu’un qui a des idées, des impressions, des sensations qu’il ne va pas forcément nous les délivrer au moment où ça a lieu. C’est ça qui met à mal certains couples, parce que c’est accepter que l’autre ne nous dise pas tout au moment où les choses ont lieu, alors qu’on est dans un même espace et parfois pour certains, un espace qui est configuré de manière très réduite et très restreinte.

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