[BEST-OF] Guérir nos traumas de l’intérieur avec Stephane Allix

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GRÉGORY : Il y a quelque chose qui m’a marqué dans votre parcours, c’est que vous êtes quelqu’un d’extrêmement rationnel. Un homme qui, à l’origine, n’était pas du tout connecté à la spiritualité et à tous ces éléments-là. Vous n’aviez plutôt pas un rejet, mais en tout cas pas mal de méfiance. Vous étiez journaliste, vous l’êtes toujours. J’aimerais comprendre comment, à 22 ans, je crois. On en arrive à interviewer le Dalaï Lama et parce que c’est vraiment un début d’histoire que je trouve intéressant.

STÉPHANE : L’histoire, elle a commencé plusieurs années avant même. Elle a commencé à 19 ans, quand je suis partie en Afghanistan clandestinement, rejoindre des moudjahidines, des combattants antisoviétiques parce que je voulais absolument devenir reporter, reporter de guerre. Donc, je suis partie comme ça, un peu à l’aventure. J’ai rejoint des combattants dans le maquis, comme autrefois, les résistants quittaient Londres pour rejoindre les maquis français. J’ai rejoint un maquis de combattants et puis j’ai passé des mois avec eux. Ça a été un premier voyage très formateur dans ce métier de journaliste. Et puis ensuite, j’ai dans les années qui ont suivi, j’ai une passion pour l’Asie et l’Asie centrale. J’avais envie de travailler sur le long cours, sur un certains nombres de pays et de sujets qui m’intéressaient. Le Tibet est un des lieux qui me fascinait, qui fascine je pense beaucoup, beaucoup de monde. Donc je suis parti en novembre 1989 à Dharamsala, en Inde. C’est là où le Dalaï Lama s’est installé après avoir fui le Tibet. Il venait d’être d’être nommé pour le prix Nobel de la paix. Et j’ai fait une demande d’interview en disant que je travaillais pour la presse française et je suis resté plusieurs semaines à attendre la réponse et la réponse est venue. J’ai eu mon entretien avec le Dalaï Lama, j’avais 21 ans, et j’ai passé une heure avec lui qui était assez cocasse parce que je ne rencontre pas du tout quelqu’un qui m’impressionnait de par sa stature spirituelle. J’étais impressionné parce que c’est la première fois que j’interviewai quelqu’un que j’avais vu en photo dans les journaux. Mais en dehors de ça, je lui ai vraiment posé des questions extrêmement pragmatiques sur la non-violence, et puis surtout, quelque chose que je ne comprenais pas à l’époque, j’étais extrêmement présomptueux. Je revenais de pays en guerre où les gens s’étaient battus, armes à la main, pour mettre dehors les envahisseurs. Et je ne comprenais pas comment un leader spirituel, mais aussi politique, parce que le Dalaï Lama était aussi un leader politique, pouvait avoir demandé à ses assassins, et à son peuple, de ne pas prendre les armes contre les Chinois. Alors à la limite que lui soit non-violent, c’est son choix, mais qui demande à l’entièreté de sa population de ne pas prendre les armes. Fait, je l’avais questionné là-dessus avec des questions très bêtes et très, très prétentieuse de jeunes gamins. Et voilà, voilà comment je me suis retrouvé face à lui.

GRÉGORY ; Alors, du coup, j’ai une question aussi, c’est comment un jeune gamin, parce que c’est vraiment ça de 19 ans, décide de partir en Afghanistan et comment ses parents le laisse partir ? Parce que vous êtes parents, d’une fille de 20 ans. Si je ne me trompe pas, 24 ans. Vous la laisserez partir comme ça en Afghanistan ? Comment ça s’est passé avec vos parents ?

STÉPHANE : Comment ça s’est passé, bah de façon très simple, ils n’étaient pas au courant. Je suis parti. Enfin, ils savaient que je voulais devenir journaliste. Je voulais devenir photographe et donc officiellement, je suis parti pour le Pakistan parce que c’est effectivement au Pakistan que se rencontraient les différents groupes de résistants. J’avais pris quelques informations auprès de journalistes que j’étais allé voir. Et ils m’avaient expliqué que tous les journalistes, comme les humanitaires d’ailleurs, prenaient contact avec des groupes de résistants qui avaient des bureaux installés au Pakistan, dans la ville de Peshawar qui était à la frontière de l’Afghanistan, et qu’une fois qu’on avait pris contact avec ces groupes, ils pouvaient vous prendre en charge ou vous emmener clandestinement dans le maquis. Donc, je suis parti en prenant un billet d’avion pour le Pakistan et en me disant bon, je vais aller voir ces résistants. Si je peux aller passer quelques jours en Afghanistan, ça sera génial, je dirais “je les fais”,  mais mon objectif prioritaire, c’était plutôt d’aller dans les camps de réfugiés, d’aller voir l’impact en fait de cette occupation soviétique de l’Afghanistan sur le Pakistan avec des millions de réfugiés qui avaient pénétré le pays. Et en fait, les choses sont allées un peu assez vite. Mais ça a été toujours comme ça dans ma vie, j’initie quelque chose, et puis, le destin prend les choses en main et m’emmène complètement autre part. Et donc, je prends contact avec un groupe de résistants. C’était un groupe qui s’appelait le Hakata Islami, le mouvement de l’islam qui n’avait jamais pris de journaliste auparavant, c’étaient des chiites, qui était une minorité en Afghanistan, et quand ils ont vu ma tête, ils n’ont pas douté une seule seconde que je puisse être journaliste et ils m’ont dit on vous emmène et trois jours après, je passais la frontière avec quelques-uns de leurs combattants. Plutôt que de quelques jours en Afghanistan, j’ai passé plusieurs mois dans le maquis. J’ai été un des seuls à pouvoir entrer clandestinement dans Kaboul, qui était à l’époque encore occupée par les Russes. Ça a été un voyage épique et en fait, mes parents ont appris ce voyage une fois de retour en France, quand ils sont venus me chercher à l’aéroport. Je leur ai dit : Bon bah, maintenant, je peux vous le dire, j’étais en Afghanistan, mais c’était le temps béni où il n’y avait pas de mail. Il n’y avait pas de téléphone portable, donc ce n’était pas du tout anormal de pas donner de nouvelles pendant des mois, alors qu’aujourd’hui, on ne peut pas passer une demi-journée sans envoyer trois mails et quatre textos et 25 coups de téléphone pour dire que tout va bien.

GRÉGORY ; C’est clair, en même temps de vous entendre, je pense que c’est le pire cauchemar des parents de se dire mon fils ou ma fille me disent qu’ils partent en vacances et y vont dans un pays en guerre en Afghanistan.

STÉPHANE : Oui, mes parents avaient une forme de peut être d’inconscience ou de confiance, mais les deux sont mêlés et je ne sais pas, ils ne m’ont jamais dit s’ils avaient été vraiment inquiets pendant ces mois, mais ils avaient aussi confiance je pense à la fois dans ma détermination et puis dans le destin. Où peut être qu’en fait, ils ont été terrifiés pendant deux mois. Ils ne l’ont jamais dit, je ne sais pas il faudrait que je demande à ma mère aujourd’hui.

GRÉGORY ; De ce que j’ai entendu, de vous, de ce que j’ai pu lire aussi, vous n’aviez pas un rapport à la spiritualité très fort à ce moment-là. C’était quoi, votre rapport à la spiritualité dans votre vingtaine ?

STÉPHANE : En fait, avant ce voyage en Afghanistan, j’avais une espèce de curiosité un petit peu romantique pour le spirituel, mais plus à travers le fantastique. J’étais un grand fan de de Lovecraft, d’Edgar Allan Poe, de ces récits qui vous parle de mondes invisibles, de monstres, de fantômes. J’avais une espèce de fascination. Et puis surtout dans certains textes, notamment dans Lovecraft. Il y a une certaine ambiguïté qui demeure dans toute son œuvre de savoir si, c’est réel. En fait, si les histoires qu’il raconte se sont vraiment passées, j’étais un peu dans cet entre deux. Et puis, en allant chercher, mais là, je vous parle de 16, 17 ans, en allant chercher dans les livres dont parle Lovecraft ou d’autres auteurs, je découvre Hélène Blavatsky, la Société théosophique, toute cette littérature dont je ne savais pas à l’époque du tout, si c’était de la réalité, si c’était de la fiction, c’était de la demi fiction, de la demie réalité. Donc, j’avais cette fascination pour l’ésotérisme sans en connaître vraiment grand-chose, en fait. Et puis, pour moi, le voyage en Afghanistan, il a marqué un arrêt brutal à ça. Parce que toute cette relation ésotérique et spirituelle était à cette époque-là pour moi, quelque chose de l’ordre d’une espèce de loisir fantastique. Et puis, en Afghanistan, je suis confronté à la guerre. Je suis confronté à des hommes qui se battent, à la réalité ultra basique et dur de ce combat. Et quand je reviens pour moi, la spiritualité s’apparente plus à une sorte de perte de temps de français préservé de toute difficulté. Et j’ai une espèce de retour en arrière complet, c’est-à-dire pour moi, je ne veux plus de tout intéressé à ça. Ce qui m’intéresse, c’est le combat, c’est la réalité des hommes qui se battent sur la terre. Et donc voilà, comme je vous le disais, même quand je rencontre le Dalaï Lama, à la limite, je m’en fou un peu de ce qu’il représente, spirituellement parlant. J’ai beaucoup de respect et je suis un peu impressionné par le personnage, mais je n’ai aucune curiosité vers les enseignements du bouddhisme. Et puis, en me promenant à Dharamsala, quand je vois tous ces Occidentaux avec le crâne rasé qui se prosterne devant des lamas, je me dis, mais où est-ce qu’il est leur libre arbitre ? Ils ont abandonné tout esprit  critique. Je suis un peu prétentieux et crétin, mais j’ai la guerre afghane et la confrontation avec des résistants et avec des moudjahidines qui se battent, qui se sont battus, m’a rendu extrêmement terre à terre et il va falloir des années avant que je commence à retrouver une sorte d’intérêt vers ce monde spirituel.

La suite à écouter sur Vlan !

Description de l’épisode

Comme chaque été, je fais une sélection des meilleurs épisodes de la saison pour vous proposer de découvrir ou de redécouvrir des épisodes exceptionnels.
Stéphane Allix est un journaliste de guerre , radicalement cartésien dans le sens qu’il ne croit que ce qu’il voit.
Pourtant, au moment du décès de son frère, presque devant lui, il se surprends à lui parler comme s’il était encore présent. Un trauma évidemment très important pour lui puisqu’il avait 32 ans et son frère 30.
C’est alors qu’a débuté une quête infinie afin de comprendre ce qu’il se passe au moment de la mort ou après la mort.
Pour ce faire, il a fini par se tourner vers des médecines hallucinogènes et en particulier les champignons.
Mais au cours de ses recherches par l’intérieur, il a découvert un trauma encore plus profond qu’il avait totalement effacé de sa mémoire: son inceste quand il était encore un jeune enfant.
Il raconte tout cela dans son dernier ouvrage: nos âmes oubliées

L’inceste est encore très tabou dans notre société et pourtant il est légèrement en train de se briser pour libérer la parole.
Evidemment si ce sujet, celui de la mort d’un proche ou des champignons vous touchent de trop, n’écoutez pas cet épisode.

Avec Stéphane , nous parlons de spiritualité, de voyance, d’inceste (nécessairement), de la mort, de la vie après la mort.
Je trouve son approche particulièrement intéressante car on accuse souvent les personnes qui sont dans cette démarche, d’être beaucoup trop “perchée” mais ce n’est pas le cas de Stéphane qui est un pur cartésien.
Une discussion qui vous donnera peut être envie de creuser des discussions avec votre famille à l’occasion des fêtes qui arrivent.

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Transcription partielle de l’épisode

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GRÉGORY : Il y a quelque chose qui m’a marqué dans votre parcours, c’est que vous êtes quelqu’un d’extrêmement rationnel. Un homme qui, à l’origine, n’était pas du tout connecté à la spiritualité et à tous ces éléments-là. Vous n’aviez plutôt pas un rejet, mais en tout cas pas mal de méfiance. Vous étiez journaliste, vous l’êtes toujours. J’aimerais comprendre comment, à 22 ans, je crois. On en arrive à interviewer le Dalaï Lama et parce que c’est vraiment un début d’histoire que je trouve intéressant.

STÉPHANE : L’histoire, elle a commencé plusieurs années avant même. Elle a commencé à 19 ans, quand je suis partie en Afghanistan clandestinement, rejoindre des moudjahidines, des combattants antisoviétiques parce que je voulais absolument devenir reporter, reporter de guerre. Donc, je suis partie comme ça, un peu à l’aventure. J’ai rejoint des combattants dans le maquis, comme autrefois, les résistants quittaient Londres pour rejoindre les maquis français. J’ai rejoint un maquis de combattants et puis j’ai passé des mois avec eux. Ça a été un premier voyage très formateur dans ce métier de journaliste. Et puis ensuite, j’ai dans les années qui ont suivi, j’ai une passion pour l’Asie et l’Asie centrale. J’avais envie de travailler sur le long cours, sur un certains nombres de pays et de sujets qui m’intéressaient. Le Tibet est un des lieux qui me fascinait, qui fascine je pense beaucoup, beaucoup de monde. Donc je suis parti en novembre 1989 à Dharamsala, en Inde. C’est là où le Dalaï Lama s’est installé après avoir fui le Tibet. Il venait d’être d’être nommé pour le prix Nobel de la paix. Et j’ai fait une demande d’interview en disant que je travaillais pour la presse française et je suis resté plusieurs semaines à attendre la réponse et la réponse est venue. J’ai eu mon entretien avec le Dalaï Lama, j’avais 21 ans, et j’ai passé une heure avec lui qui était assez cocasse parce que je ne rencontre pas du tout quelqu’un qui m’impressionnait de par sa stature spirituelle. J’étais impressionné parce que c’est la première fois que j’interviewai quelqu’un que j’avais vu en photo dans les journaux. Mais en dehors de ça, je lui ai vraiment posé des questions extrêmement pragmatiques sur la non-violence, et puis surtout, quelque chose que je ne comprenais pas à l’époque, j’étais extrêmement présomptueux. Je revenais de pays en guerre où les gens s’étaient battus, armes à la main, pour mettre dehors les envahisseurs. Et je ne comprenais pas comment un leader spirituel, mais aussi politique, parce que le Dalaï Lama était aussi un leader politique, pouvait avoir demandé à ses assassins, et à son peuple, de ne pas prendre les armes contre les Chinois. Alors à la limite que lui soit non-violent, c’est son choix, mais qui demande à l’entièreté de sa population de ne pas prendre les armes. Fait, je l’avais questionné là-dessus avec des questions très bêtes et très, très prétentieuse de jeunes gamins. Et voilà, voilà comment je me suis retrouvé face à lui.

GRÉGORY ; Alors, du coup, j’ai une question aussi, c’est comment un jeune gamin, parce que c’est vraiment ça de 19 ans, décide de partir en Afghanistan et comment ses parents le laisse partir ? Parce que vous êtes parents, d’une fille de 20 ans. Si je ne me trompe pas, 24 ans. Vous la laisserez partir comme ça en Afghanistan ? Comment ça s’est passé avec vos parents ?

STÉPHANE : Comment ça s’est passé, bah de façon très simple, ils n’étaient pas au courant. Je suis parti. Enfin, ils savaient que je voulais devenir journaliste. Je voulais devenir photographe et donc officiellement, je suis parti pour le Pakistan parce que c’est effectivement au Pakistan que se rencontraient les différents groupes de résistants. J’avais pris quelques informations auprès de journalistes que j’étais allé voir. Et ils m’avaient expliqué que tous les journalistes, comme les humanitaires d’ailleurs, prenaient contact avec des groupes de résistants qui avaient des bureaux installés au Pakistan, dans la ville de Peshawar qui était à la frontière de l’Afghanistan, et qu’une fois qu’on avait pris contact avec ces groupes, ils pouvaient vous prendre en charge ou vous emmener clandestinement dans le maquis. Donc, je suis parti en prenant un billet d’avion pour le Pakistan et en me disant bon, je vais aller voir ces résistants. Si je peux aller passer quelques jours en Afghanistan, ça sera génial, je dirais “je les fais”,  mais mon objectif prioritaire, c’était plutôt d’aller dans les camps de réfugiés, d’aller voir l’impact en fait de cette occupation soviétique de l’Afghanistan sur le Pakistan avec des millions de réfugiés qui avaient pénétré le pays. Et en fait, les choses sont allées un peu assez vite. Mais ça a été toujours comme ça dans ma vie, j’initie quelque chose, et puis, le destin prend les choses en main et m’emmène complètement autre part. Et donc, je prends contact avec un groupe de résistants. C’était un groupe qui s’appelait le Hakata Islami, le mouvement de l’islam qui n’avait jamais pris de journaliste auparavant, c’étaient des chiites, qui était une minorité en Afghanistan, et quand ils ont vu ma tête, ils n’ont pas douté une seule seconde que je puisse être journaliste et ils m’ont dit on vous emmène et trois jours après, je passais la frontière avec quelques-uns de leurs combattants. Plutôt que de quelques jours en Afghanistan, j’ai passé plusieurs mois dans le maquis. J’ai été un des seuls à pouvoir entrer clandestinement dans Kaboul, qui était à l’époque encore occupée par les Russes. Ça a été un voyage épique et en fait, mes parents ont appris ce voyage une fois de retour en France, quand ils sont venus me chercher à l’aéroport. Je leur ai dit : Bon bah, maintenant, je peux vous le dire, j’étais en Afghanistan, mais c’était le temps béni où il n’y avait pas de mail. Il n’y avait pas de téléphone portable, donc ce n’était pas du tout anormal de pas donner de nouvelles pendant des mois, alors qu’aujourd’hui, on ne peut pas passer une demi-journée sans envoyer trois mails et quatre textos et 25 coups de téléphone pour dire que tout va bien.

GRÉGORY ; C’est clair, en même temps de vous entendre, je pense que c’est le pire cauchemar des parents de se dire mon fils ou ma fille me disent qu’ils partent en vacances et y vont dans un pays en guerre en Afghanistan.

STÉPHANE : Oui, mes parents avaient une forme de peut être d’inconscience ou de confiance, mais les deux sont mêlés et je ne sais pas, ils ne m’ont jamais dit s’ils avaient été vraiment inquiets pendant ces mois, mais ils avaient aussi confiance je pense à la fois dans ma détermination et puis dans le destin. Où peut être qu’en fait, ils ont été terrifiés pendant deux mois. Ils ne l’ont jamais dit, je ne sais pas il faudrait que je demande à ma mère aujourd’hui.

GRÉGORY ; De ce que j’ai entendu, de vous, de ce que j’ai pu lire aussi, vous n’aviez pas un rapport à la spiritualité très fort à ce moment-là. C’était quoi, votre rapport à la spiritualité dans votre vingtaine ?

STÉPHANE : En fait, avant ce voyage en Afghanistan, j’avais une espèce de curiosité un petit peu romantique pour le spirituel, mais plus à travers le fantastique. J’étais un grand fan de de Lovecraft, d’Edgar Allan Poe, de ces récits qui vous parle de mondes invisibles, de monstres, de fantômes. J’avais une espèce de fascination. Et puis surtout dans certains textes, notamment dans Lovecraft. Il y a une certaine ambiguïté qui demeure dans toute son œuvre de savoir si, c’est réel. En fait, si les histoires qu’il raconte se sont vraiment passées, j’étais un peu dans cet entre deux. Et puis, en allant chercher, mais là, je vous parle de 16, 17 ans, en allant chercher dans les livres dont parle Lovecraft ou d’autres auteurs, je découvre Hélène Blavatsky, la Société théosophique, toute cette littérature dont je ne savais pas à l’époque du tout, si c’était de la réalité, si c’était de la fiction, c’était de la demi fiction, de la demie réalité. Donc, j’avais cette fascination pour l’ésotérisme sans en connaître vraiment grand-chose, en fait. Et puis, pour moi, le voyage en Afghanistan, il a marqué un arrêt brutal à ça. Parce que toute cette relation ésotérique et spirituelle était à cette époque-là pour moi, quelque chose de l’ordre d’une espèce de loisir fantastique. Et puis, en Afghanistan, je suis confronté à la guerre. Je suis confronté à des hommes qui se battent, à la réalité ultra basique et dur de ce combat. Et quand je reviens pour moi, la spiritualité s’apparente plus à une sorte de perte de temps de français préservé de toute difficulté. Et j’ai une espèce de retour en arrière complet, c’est-à-dire pour moi, je ne veux plus de tout intéressé à ça. Ce qui m’intéresse, c’est le combat, c’est la réalité des hommes qui se battent sur la terre. Et donc voilà, comme je vous le disais, même quand je rencontre le Dalaï Lama, à la limite, je m’en fou un peu de ce qu’il représente, spirituellement parlant. J’ai beaucoup de respect et je suis un peu impressionné par le personnage, mais je n’ai aucune curiosité vers les enseignements du bouddhisme. Et puis, en me promenant à Dharamsala, quand je vois tous ces Occidentaux avec le crâne rasé qui se prosterne devant des lamas, je me dis, mais où est-ce qu’il est leur libre arbitre ? Ils ont abandonné tout esprit  critique. Je suis un peu prétentieux et crétin, mais j’ai la guerre afghane et la confrontation avec des résistants et avec des moudjahidines qui se battent, qui se sont battus, m’a rendu extrêmement terre à terre et il va falloir des années avant que je commence à retrouver une sorte d’intérêt vers ce monde spirituel.

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