[BEST-OF] Changer de vie et revenir à l’essentiel avec Pedro Correa

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GRÉGORY : Comment tu vas, comment tu as traversé ou comment tu traverses cette année 2020 ?

PEDRO : C’est comme tout le monde, avec des hauts et des bas, avec des pics et des creux de vague, tout ça, mais je me sens malgré tout très très reconnaissant. Je me rends bien compte que j’ai eu beaucoup de chance par rapport à des millions d’autres, parce que ça a été aussi malgré tout l’année où j’ai vécu mon rêve d’enfant qui était d’écrire un livre et qui a été publié. Donc voilà, c’est une année haute en rebondissements pour moi, avec beaucoup de frustration, de chagrin et d’énorme joie aussi.

GRÉGORY : C’est super intéressant, et justement, je crois que cette conversation qu’on va avoir, elle va intéresser beaucoup de monde parce que je pense qu’on est tous, toutes, plus ou moins complètement chamboulé par cette année 2020. Je pense qu’on comprend parce que maintenant ça s’installe dans le vocabulaire qu’il y avait un monde d’avant et que par définition, il va y avoir un monde d’après. Mais quand on dit ça, ça sous-entend qu’évidemment on ne retournera pas au monde d’avant. Donc c’est une forme de deuil quelque part de ce monde d’avant et quelque part, ça remue chacun, même si je pense que dans notre fond intérieur, on aimerait bien tous/toutes retourner à ce monde d’avant, mais qu’évidemment, ce n’est pas vraiment possible. Ce qu’on a discuté ensemble et toi, tu as complètement changé de vie, je pense qu’il y a beaucoup de personnes qui se posent la question de leurs priorités et je pense que cette année-là, elle remet en cause aussi nos priorités. Moi, je crois beaucoup qu’on passe d’une société du bien à une société du lien. Alors ce n’est évidemment pas une transition qui se fait dans la minute, c’est quelque chose qui se passe sur un temps long. Moi, je pense que ça fait 40/50 ans qu’on y est déjà, mais que les dix prochaines années vont vraiment passer cette transition. Toi, tu as été médiatisé, par un speech que tu as donné dans ton université, aux nouveaux diplômés. Qu’est-ce que tu penses de cette transition ? Parce que toi, t’as fait cette école d’ingénieur à Polytechnique et puis finalement, tu as complètement changé de vie, comment tu vis ce passage et c’est quoi le process qui s’est passé en toi ?

PEDRO : Vaste question. Oui, ça a été médiatisé, c’est venu comme ça d’un coup dans les réseaux sociaux. Ce discours qui était censé être dirigé qu’à 400 personnes, 400 étudiants diplômés de la même école polytechnique que moi. Et ça a l’air soudain comme ça, ça a l’air de rentrer dans cette case du fantasme néolibéral de la success story, du jour au lendemain, il devient médiatisé, du jour au lendemain, il a changé de vie. Mais en fait pas du tout ce discours-là, c’est le résultat de 10 ans de, j’allais dire de galère, mais c’est connoté négativement, ce n’était pas la galère, c’est 10 ans de recherches, de d’essais, d’erreurs et donc de joie. La recherche du bonheur, c’est déjà une joie en soi. Pour moi, la dépression, ce n’est pas le synonyme de tristesse, pour moi, la dépression, c’est plutôt synonyme de stagnation, de résignation. Et donc le fait de se mettre en marche, de chercher, même si on tâtonne, même si on n’est pas sûr du coup, c’est déjà pour moi le début du bonheur, le début d’une quête de sens que l’on a aujourd’hui des millions d’entre nous, ce que j’appelle la relève, on est une relève de millions et de millions de personnes qui se sont rendu compte qu’ils devaient commencer cette quête de sens. Parce que tout ce qu’on nous a raconté jusqu’ici a fait ses preuves ou en tout cas a prouvé que ça nous rend malade, triste et que ça tue tout ce qui nous entoure. Et donc, c’est une quête pour moi qui a commencé à mes 30 ans, j’en ai 43, suite à la mort de mon père. Donc ça commence d’une façon très tragique. Je ne suis pas sûr que tout le monde doivent passer par ça pour commencer ça, mais en tout cas, je les invite à le faire sans devoir attendre un déclic aussi douloureux. Mon père était en pleine forme, je l’aimais plus que tout. J’en parle dans mon livre avec beaucoup d’amour, même si c’est lui qui m’a poussé à faire des études qui ne me correspondait pas du tout. Et je l’ai vu mourir sous mes yeux du jour au lendemain, un accident tragique. Et c’est là que tout a commencé. Le fait de ce que j’appelle les travaux pratiques de la mortalité, jusque-là, comme tout le monde, comme nous tous, j’avais une conception théorique de notre mortalité, ce qu’on nous apprend tous : qu’on est mortel. Et donc, ça reste un concept théorique que tout le monde essaye, dont tout le monde essaye de parler le moins possible. Donc ça reste un concept très, très nébuleux, très vague, on sait bien que oui, tout meurt etc, mais on n’en parle pas assez, on ne va pas voir les hôpitaux, les cimetières, on ne parle pas à des gens mourants, on essaye d’éviter tout ça. Moi, j’ai fait les travaux pratiques de ça. Je ne suis passée de “je suis mortelle” à “Je vais mourir”, c’est clair, je vais mourir et ça peut m’arriver comme à mon père du jour au lendemain, alors qu’il est en pleine forme. Et donc là, tout bascule parce que la vie prend tout un autre sens qui est celui d’être fragile, éphémère et donc très précieux. Donc chaque seconde est précieuse et comme beaucoup d’autres qui frôlent la mort, tous ces gens que dont on entend des histoires incroyables qui ont frôlé la mort et qui se sont sentis renaître à nouveau, à qui on a dit vous en avait pour trois semaines et en fait ils ont vaincu le cancer et maintenant ils revivent normalement ou des gens qui ont eu des accidents, etc, et quand ils reviennent à la vie, ils ont tout sauf peur de mourir. Ils ne deviennent pas hypocondriaques à se terrer chez eux, à se protéger de tous les maux. Ils vivent la vie pleinement parce qu’ils se sont rendus compte qu’elle est précieuse et qu’il faut la vivre à fond. On ne peut plus sacrifier nos secondes comme ça sur un autel. J’en parle dans le livre de l’origine du mot sacrifice, qui revient souvent grâce à ma lignée, ces revenus dans ma vie, plusieurs fois, et l’origine latine, ou en tout cas la définition dans le Larousse, ça m’a vraiment frappé quand je l’ai lu, ça vient du latin et de ce don d’offrande de biens, de fruits et parfois de vie à une déité, à un dieu. J’ai fait le parallèle en me disant, mais en fait, on est nous tous ou beaucoup d’entre nous, en train de sacrifier, de faire le don de notre vie à une déesse ou à un dieu. On ne sait pas lequel, chacun a le sien, ça peut être l’argent, ça peut être le confort, ça peut être la carrière, ça peut être l’accumulation des dieux comme ça qu’on nous a construit et on sacrifie nos secondes et nos vies à ces Dieu là. Jusqu’au jour, où on se rend compte qu’en fait ces secondes sont hyper précieuses et qu’on ferait bien de commencer à se poser la question de qu’est-ce qu’on veut en faire vraiment de ces secondes ? Et c’est cette phrase qui a commencé à surgir dans ma tête après la mort de mon père, tous les jours, c’était “Si tu devais mourir demain, serais-tu satisfait de cette dernière journée que tu viens de passer ?” Et quand tu poses cette question-là tous les jours, mais ça ne peut que mener à des changements. 

La suite a écouté sur VLAN !

Description de l’épisode

Pedro Correa est polytechnicien mais ce qui nous intéresse aujourd’hui c’est qu’il ait transformé sa vie pour devenir photographe, auteur et conférencier.

Dans son livre “Matins clairs” qui est une lettre à tous ceux qui souhaitent changer de vie, il expose comment en étant marié, papa et avec un crédit sur le dos, il a réussi a transformer sa vie.

Souvent, une des réponses que l’on donne quand il s’agit de transformer sa vie pour quelque chose que l’on aimerait, c’est de définir que l’on a trop de responsabilité et que par définition ce n’est pas possible.

Pas de conte de fée ici, ce processus a pris 10 ans et il nous explique l’éveil lié au décès brutal de son père, le rôle de la société, le rôle de sa lignée d’hommes, les réflexions qu’il y a eu et celles qu’il a encore aujourd’hui.

Evidemment nous parlons de capitalisme, de patriarcat, des injonctions sociétales.

Alors que certaines personnes se sont éveillées en 2020, cet épisode me semble tomber à point nommé pour envisager les années suivantes d’une manière différente. Peut être que cet épisode participera dans votre réflexion à son humble échelle. Si c’est le cas, j’en serai évidemment ravi.

Bonne écoute à toutes et tous.

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Transcription partielle de l’épisode

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GRÉGORY : Comment tu vas, comment tu as traversé ou comment tu traverses cette année 2020 ?

PEDRO : C’est comme tout le monde, avec des hauts et des bas, avec des pics et des creux de vague, tout ça, mais je me sens malgré tout très très reconnaissant. Je me rends bien compte que j’ai eu beaucoup de chance par rapport à des millions d’autres, parce que ça a été aussi malgré tout l’année où j’ai vécu mon rêve d’enfant qui était d’écrire un livre et qui a été publié. Donc voilà, c’est une année haute en rebondissements pour moi, avec beaucoup de frustration, de chagrin et d’énorme joie aussi.

GRÉGORY : C’est super intéressant, et justement, je crois que cette conversation qu’on va avoir, elle va intéresser beaucoup de monde parce que je pense qu’on est tous, toutes, plus ou moins complètement chamboulé par cette année 2020. Je pense qu’on comprend parce que maintenant ça s’installe dans le vocabulaire qu’il y avait un monde d’avant et que par définition, il va y avoir un monde d’après. Mais quand on dit ça, ça sous-entend qu’évidemment on ne retournera pas au monde d’avant. Donc c’est une forme de deuil quelque part de ce monde d’avant et quelque part, ça remue chacun, même si je pense que dans notre fond intérieur, on aimerait bien tous/toutes retourner à ce monde d’avant, mais qu’évidemment, ce n’est pas vraiment possible. Ce qu’on a discuté ensemble et toi, tu as complètement changé de vie, je pense qu’il y a beaucoup de personnes qui se posent la question de leurs priorités et je pense que cette année-là, elle remet en cause aussi nos priorités. Moi, je crois beaucoup qu’on passe d’une société du bien à une société du lien. Alors ce n’est évidemment pas une transition qui se fait dans la minute, c’est quelque chose qui se passe sur un temps long. Moi, je pense que ça fait 40/50 ans qu’on y est déjà, mais que les dix prochaines années vont vraiment passer cette transition. Toi, tu as été médiatisé, par un speech que tu as donné dans ton université, aux nouveaux diplômés. Qu’est-ce que tu penses de cette transition ? Parce que toi, t’as fait cette école d’ingénieur à Polytechnique et puis finalement, tu as complètement changé de vie, comment tu vis ce passage et c’est quoi le process qui s’est passé en toi ?

PEDRO : Vaste question. Oui, ça a été médiatisé, c’est venu comme ça d’un coup dans les réseaux sociaux. Ce discours qui était censé être dirigé qu’à 400 personnes, 400 étudiants diplômés de la même école polytechnique que moi. Et ça a l’air soudain comme ça, ça a l’air de rentrer dans cette case du fantasme néolibéral de la success story, du jour au lendemain, il devient médiatisé, du jour au lendemain, il a changé de vie. Mais en fait pas du tout ce discours-là, c’est le résultat de 10 ans de, j’allais dire de galère, mais c’est connoté négativement, ce n’était pas la galère, c’est 10 ans de recherches, de d’essais, d’erreurs et donc de joie. La recherche du bonheur, c’est déjà une joie en soi. Pour moi, la dépression, ce n’est pas le synonyme de tristesse, pour moi, la dépression, c’est plutôt synonyme de stagnation, de résignation. Et donc le fait de se mettre en marche, de chercher, même si on tâtonne, même si on n’est pas sûr du coup, c’est déjà pour moi le début du bonheur, le début d’une quête de sens que l’on a aujourd’hui des millions d’entre nous, ce que j’appelle la relève, on est une relève de millions et de millions de personnes qui se sont rendu compte qu’ils devaient commencer cette quête de sens. Parce que tout ce qu’on nous a raconté jusqu’ici a fait ses preuves ou en tout cas a prouvé que ça nous rend malade, triste et que ça tue tout ce qui nous entoure. Et donc, c’est une quête pour moi qui a commencé à mes 30 ans, j’en ai 43, suite à la mort de mon père. Donc ça commence d’une façon très tragique. Je ne suis pas sûr que tout le monde doivent passer par ça pour commencer ça, mais en tout cas, je les invite à le faire sans devoir attendre un déclic aussi douloureux. Mon père était en pleine forme, je l’aimais plus que tout. J’en parle dans mon livre avec beaucoup d’amour, même si c’est lui qui m’a poussé à faire des études qui ne me correspondait pas du tout. Et je l’ai vu mourir sous mes yeux du jour au lendemain, un accident tragique. Et c’est là que tout a commencé. Le fait de ce que j’appelle les travaux pratiques de la mortalité, jusque-là, comme tout le monde, comme nous tous, j’avais une conception théorique de notre mortalité, ce qu’on nous apprend tous : qu’on est mortel. Et donc, ça reste un concept théorique que tout le monde essaye, dont tout le monde essaye de parler le moins possible. Donc ça reste un concept très, très nébuleux, très vague, on sait bien que oui, tout meurt etc, mais on n’en parle pas assez, on ne va pas voir les hôpitaux, les cimetières, on ne parle pas à des gens mourants, on essaye d’éviter tout ça. Moi, j’ai fait les travaux pratiques de ça. Je ne suis passée de “je suis mortelle” à “Je vais mourir”, c’est clair, je vais mourir et ça peut m’arriver comme à mon père du jour au lendemain, alors qu’il est en pleine forme. Et donc là, tout bascule parce que la vie prend tout un autre sens qui est celui d’être fragile, éphémère et donc très précieux. Donc chaque seconde est précieuse et comme beaucoup d’autres qui frôlent la mort, tous ces gens que dont on entend des histoires incroyables qui ont frôlé la mort et qui se sont sentis renaître à nouveau, à qui on a dit vous en avait pour trois semaines et en fait ils ont vaincu le cancer et maintenant ils revivent normalement ou des gens qui ont eu des accidents, etc, et quand ils reviennent à la vie, ils ont tout sauf peur de mourir. Ils ne deviennent pas hypocondriaques à se terrer chez eux, à se protéger de tous les maux. Ils vivent la vie pleinement parce qu’ils se sont rendus compte qu’elle est précieuse et qu’il faut la vivre à fond. On ne peut plus sacrifier nos secondes comme ça sur un autel. J’en parle dans le livre de l’origine du mot sacrifice, qui revient souvent grâce à ma lignée, ces revenus dans ma vie, plusieurs fois, et l’origine latine, ou en tout cas la définition dans le Larousse, ça m’a vraiment frappé quand je l’ai lu, ça vient du latin et de ce don d’offrande de biens, de fruits et parfois de vie à une déité, à un dieu. J’ai fait le parallèle en me disant, mais en fait, on est nous tous ou beaucoup d’entre nous, en train de sacrifier, de faire le don de notre vie à une déesse ou à un dieu. On ne sait pas lequel, chacun a le sien, ça peut être l’argent, ça peut être le confort, ça peut être la carrière, ça peut être l’accumulation des dieux comme ça qu’on nous a construit et on sacrifie nos secondes et nos vies à ces Dieu là. Jusqu’au jour, où on se rend compte qu’en fait ces secondes sont hyper précieuses et qu’on ferait bien de commencer à se poser la question de qu’est-ce qu’on veut en faire vraiment de ces secondes ? Et c’est cette phrase qui a commencé à surgir dans ma tête après la mort de mon père, tous les jours, c’était “Si tu devais mourir demain, serais-tu satisfait de cette dernière journée que tu viens de passer ?” Et quand tu poses cette question-là tous les jours, mais ça ne peut que mener à des changements. 

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