#235 Comprendre la réalité des dynamiques de genres à travers les primates avec Frans de Waal

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#235 Comprendre la réalité des dynamiques de genres à travers les primates avec Frans de Waal
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GREGORY : Bonjour à tous et bonjour à tous. Bonjour Frans. Bonjour, Comment vous allez aujourd’hui ? Ça va très bien, ça va bien. La première question que j’ai pour vous sans doute, c’est de me dire le rôle des primatologues dans la compréhension des humains et plus spécifiquement du genre.

FRANS : Oui, nous sommes des primates. Alors les psychologues, sont aussi des primatologues dans un sens. Et on peut comparer l’Homme avec d’autres primates, surtout les chimpanzés et le bonobo, qui sont le plus proche de nous. Il y a bien sûr une évolution de 6 millions d’années séparées que nous avons eu et on a changé. On n’est pas exactement pareil qu’eux, ça c’est clair. Mais pour une description de genre, je crois que c’est intéressant de connaître les mâles, femelles et toutes les autres variabilité qui existent chez les autres primates. Moi je crois que par exemple, la différence entre mâle et femelle est universelle chez l’Homme et on la trouve chez beaucoup de primates. C’est presque sûr qu’il y a un côté biologique là dedans.

GREGORY : Et vous parlez aussi des primatologues femmes. Quel est le rôle qu’elles ont eu dans l’évolution de la compréhension du genre?

FRANS :  Oui, c’est intéressant parce que quand j’étais étudiant, il y avait presque que des hommes dans primatologie et les femmes sont venues dans les années 60-70, quand j’étais encore étudiant. Elles n’ont pas changé le travail scientifique, mais elles ont changé le sujet et elles étaient intéressées dans d’autres choses. Par exemple les hommes primatologues étaient surtout intéressés dans le le violence, la dominance des mâles. Ils disaient que le mâle organisait les sociétés primates et tout ça. Ils avaient quelques fois des vues très primitives, dans mon opinion, de différence entre mâle et femelle. Quand les femmes sont venues, ils se sont intéréssés au lien avec les femelles. Ils se sont intéréssés au “female choice”, le choix de partenaire fait par les femelles, pas par le mâle. Ils se sont intéressés aux jeunes primates et comment ils étaient élevés tout ça. Ils ont songé à changer le sujet et c’était positif dans le sens où on a qu’une vision des sociétés primates qui est maintenant plus complète que autrefois.

GREGORY :  Vous avez écrit “on naît avec un sexe, mais pas avec un genre” dans le livre et je dois savoir du coup pourquoi vous avez appelé votre livre “différent” ?

FRANS : Oui, j’ai utilisé le nom différent parce que quelquefois, les gens veulent éliminer les différences de genre et par exemple, il y a tout un mouvement pour élever les enfants de manière “gender neutral”, que je trouve un peu bizarre parce qu’on est né avec un genre et une identité. Et je trouve que les différences entre mâle / femelle ou homme / femme sont importants. Il ne faut pas le nier, même si je trouve que souvent les différences qu’on propose n’existent pas. Ou les différences, en somme, qui existent chez les primates n’existent pas non plus. Quelques fois et alors? Et dans un sens, il y a moins de différences que ce que les gens pensent. Dans un autre côté, il ne faut pas nier les différences qui existent déjà.

GREGORY : Donc vous diriez qu’on naît avec un cerveau qui est genré quelque part?

FRANS : Il y a une identité. Les enfants sont nés avec une identité de genre. On a toute cette discussion sur les gens transgenres, il y a une étude récemment aux États-Unis qui montre que les enfants, d’abord les enfants, ont leur identité transgenre très jeune, vers quatre ans, cinq ans, quelquefois plus jeune que ça, et ils ne changent pas d’opinion. Il y a seulement 2 % et demi qui, six ans plus tard changent d’avis. Cela veut dire que la plus part, quand ils disent qu’il est né comme un petit garçon, imaginent et disent je suis une fille. Ils ne vont pas changer d’opinion, même si toute la famille, l’école essaient de le convaincre, qui ne sont pas ce qu’ils disent qu’ils sont. Alors ça veut dire que c’est très résistant. Ça arrive très tôt. Ça veut dire que l’identité transgenre biologique dans mon opinion. Mais c’est aussi vrai pour les identités d’autres genres comme toi tu as une identité d’homme par exemple. Tu es aussi né avec ça et ça change pas non plus. Alors c’est pour ça que le biologique doit être amené par une discussion de genre. C’est vrai que comment tu te comportes en tant qu’homme et femme, est très influencée par les cultures, et je crois aussi chez d’autres primates pas seulement chez nous, la culture a une grande influence. Mais l’identité elle même n’est pas tellement influencée par la culture.

GREGORY : Alors, c’est quoi les principales caractéristiques des identités de genre pour les femelles et ensuite pour les mâles?

FRANS : Oui, je ne crois pas que ce soit une caractéristique qu’on peut exprimer en comportement. Par exemple. Tu es né, imagine avec une identité mâle. Ça veut dire que tu vas regarder les hommes autour de toi comme modèle. Tu vas le prendre pour auto-socialisation. Tu imites les hommes et quand tu est né avec une identité femelle, tu as mis ta mère et d’autres femmes ou des princesses que tu vois dans un film. Et cette auto-socialisation est très importante, je crois et on le voit aussi chez d’autres primates. Tu peux parler de ça, et fait que tu deviens un homme comme les hommes autour de toi et une femme comme les femmes autour de toi. Ça, c’est le côté culturel. Si tu étais dans une autre culture où les femmes se comportent différemment, tu tu ferais ça. Et ça, c’est le côté culturel. Et cette autre socialisation est très importante parce que les gens pensent souvent que eux, ils socialisent leurs enfants. Ils pensent que c’est nous qui choisissons le jouet, nous qui transmettons nos idées. Moi, je pense que les enfants, ils sont très bien observateurs et ils observent les gens. Et c’est ça qu’ils apprennent.

GREGORY : Dans le livre et j’ai trouvé ça hyper intéressant. Vous dites que imiter son genre, ça active les centres de récompenses du cerveau. En fait, est ce que ce que vous décrivez, on le fait aussi parce que biologiquement, on est construit pour imiter son genre?

FRANS : Oui, et ça, c’est une interaction biologique, culturelle dans un sens. Tu es né avec une certaine identité et tu es né avec une tendance à imiter ceux qui ont le même identité.

Description de l’épisode

Frans de Waal est un primatologue, c’est à dire un Biologiste spécialisé dans l’étude des primates. Mais c’est surtout l’un des primatologues le plus connu au monde par son ouverture et ce qu’il a apporté à la compréhension des être humains à travers l’analyse de différentes races de singes mais principalement celles qui nous ressemblent le plus : les chimpanzés et les bonobos (nous partageons 98% de nos gènes avec l’une et l’autre espèce).
Je vous préviens tout de suite, son livre, “Différent – le genre vu par un primatologue”, est l’un des ouvrages que j’ai préféré lire sur les dernières années, sans doute le meilleur cette année.
Je dirais qu’il permet de remettre l’église au milieu du village quand il s’agit de toutes ces discussions autour du genre sur lesquelles beaucoup de personnes s’étripent sans vraiment savoir de quoi elles parlent par ailleurs.
Qu’il s’agisse d’éducation, de sexe, de rapport de genre, de dynamique entre males, entre femelles mais aussi inter genre, de l’instinct maternel, de la culture du viol, des males alpha, des femelles alpha, de l’homosexualité, de la bisexualité, des transgenres.

Entre autre, vous verrez qu’évidemment l’homosexualité et le transgenre ne sont pas des maladies mais sont des choses naturelles dans le sens ou on les retrouve dans la nature et que la bisexualité est la norme chez les bonobos et est très courante chez les chimpanzés.
Bref, on parle de milles choses passionnantes qui vont choquer certains, rassurer d’autres et en étonner plus d’un, c’est une certitude.
J’ai le grand plaisir de vous offrir cette conversation en français qui ne manquera pas de générer des conversations dans votre couple, dans votre cercle amical voire familiale également.

J’espère que vous prendrez autant de plaisir que moi et que cela vous donnera envie de lire son ouvrage.

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Transcription partielle de l’épisode

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GREGORY : Bonjour à tous et bonjour à tous. Bonjour Frans. Bonjour, Comment vous allez aujourd’hui ? Ça va très bien, ça va bien. La première question que j’ai pour vous sans doute, c’est de me dire le rôle des primatologues dans la compréhension des humains et plus spécifiquement du genre.

FRANS : Oui, nous sommes des primates. Alors les psychologues, sont aussi des primatologues dans un sens. Et on peut comparer l’Homme avec d’autres primates, surtout les chimpanzés et le bonobo, qui sont le plus proche de nous. Il y a bien sûr une évolution de 6 millions d’années séparées que nous avons eu et on a changé. On n’est pas exactement pareil qu’eux, ça c’est clair. Mais pour une description de genre, je crois que c’est intéressant de connaître les mâles, femelles et toutes les autres variabilité qui existent chez les autres primates. Moi je crois que par exemple, la différence entre mâle et femelle est universelle chez l’Homme et on la trouve chez beaucoup de primates. C’est presque sûr qu’il y a un côté biologique là dedans.

GREGORY : Et vous parlez aussi des primatologues femmes. Quel est le rôle qu’elles ont eu dans l’évolution de la compréhension du genre?

FRANS :  Oui, c’est intéressant parce que quand j’étais étudiant, il y avait presque que des hommes dans primatologie et les femmes sont venues dans les années 60-70, quand j’étais encore étudiant. Elles n’ont pas changé le travail scientifique, mais elles ont changé le sujet et elles étaient intéressées dans d’autres choses. Par exemple les hommes primatologues étaient surtout intéressés dans le le violence, la dominance des mâles. Ils disaient que le mâle organisait les sociétés primates et tout ça. Ils avaient quelques fois des vues très primitives, dans mon opinion, de différence entre mâle et femelle. Quand les femmes sont venues, ils se sont intéréssés au lien avec les femelles. Ils se sont intéréssés au “female choice”, le choix de partenaire fait par les femelles, pas par le mâle. Ils se sont intéressés aux jeunes primates et comment ils étaient élevés tout ça. Ils ont songé à changer le sujet et c’était positif dans le sens où on a qu’une vision des sociétés primates qui est maintenant plus complète que autrefois.

GREGORY :  Vous avez écrit “on naît avec un sexe, mais pas avec un genre” dans le livre et je dois savoir du coup pourquoi vous avez appelé votre livre “différent” ?

FRANS : Oui, j’ai utilisé le nom différent parce que quelquefois, les gens veulent éliminer les différences de genre et par exemple, il y a tout un mouvement pour élever les enfants de manière “gender neutral”, que je trouve un peu bizarre parce qu’on est né avec un genre et une identité. Et je trouve que les différences entre mâle / femelle ou homme / femme sont importants. Il ne faut pas le nier, même si je trouve que souvent les différences qu’on propose n’existent pas. Ou les différences, en somme, qui existent chez les primates n’existent pas non plus. Quelques fois et alors? Et dans un sens, il y a moins de différences que ce que les gens pensent. Dans un autre côté, il ne faut pas nier les différences qui existent déjà.

GREGORY : Donc vous diriez qu’on naît avec un cerveau qui est genré quelque part?

FRANS : Il y a une identité. Les enfants sont nés avec une identité de genre. On a toute cette discussion sur les gens transgenres, il y a une étude récemment aux États-Unis qui montre que les enfants, d’abord les enfants, ont leur identité transgenre très jeune, vers quatre ans, cinq ans, quelquefois plus jeune que ça, et ils ne changent pas d’opinion. Il y a seulement 2 % et demi qui, six ans plus tard changent d’avis. Cela veut dire que la plus part, quand ils disent qu’il est né comme un petit garçon, imaginent et disent je suis une fille. Ils ne vont pas changer d’opinion, même si toute la famille, l’école essaient de le convaincre, qui ne sont pas ce qu’ils disent qu’ils sont. Alors ça veut dire que c’est très résistant. Ça arrive très tôt. Ça veut dire que l’identité transgenre biologique dans mon opinion. Mais c’est aussi vrai pour les identités d’autres genres comme toi tu as une identité d’homme par exemple. Tu es aussi né avec ça et ça change pas non plus. Alors c’est pour ça que le biologique doit être amené par une discussion de genre. C’est vrai que comment tu te comportes en tant qu’homme et femme, est très influencée par les cultures, et je crois aussi chez d’autres primates pas seulement chez nous, la culture a une grande influence. Mais l’identité elle même n’est pas tellement influencée par la culture.

GREGORY : Alors, c’est quoi les principales caractéristiques des identités de genre pour les femelles et ensuite pour les mâles?

FRANS : Oui, je ne crois pas que ce soit une caractéristique qu’on peut exprimer en comportement. Par exemple. Tu es né, imagine avec une identité mâle. Ça veut dire que tu vas regarder les hommes autour de toi comme modèle. Tu vas le prendre pour auto-socialisation. Tu imites les hommes et quand tu est né avec une identité femelle, tu as mis ta mère et d’autres femmes ou des princesses que tu vois dans un film. Et cette auto-socialisation est très importante, je crois et on le voit aussi chez d’autres primates. Tu peux parler de ça, et fait que tu deviens un homme comme les hommes autour de toi et une femme comme les femmes autour de toi. Ça, c’est le côté culturel. Si tu étais dans une autre culture où les femmes se comportent différemment, tu tu ferais ça. Et ça, c’est le côté culturel. Et cette autre socialisation est très importante parce que les gens pensent souvent que eux, ils socialisent leurs enfants. Ils pensent que c’est nous qui choisissons le jouet, nous qui transmettons nos idées. Moi, je pense que les enfants, ils sont très bien observateurs et ils observent les gens. Et c’est ça qu’ils apprennent.

GREGORY : Dans le livre et j’ai trouvé ça hyper intéressant. Vous dites que imiter son genre, ça active les centres de récompenses du cerveau. En fait, est ce que ce que vous décrivez, on le fait aussi parce que biologiquement, on est construit pour imiter son genre?

FRANS : Oui, et ça, c’est une interaction biologique, culturelle dans un sens. Tu es né avec une certaine identité et tu es né avec une tendance à imiter ceux qui ont le même identité.

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