#211 Dépasser les idées reçues sur le Jihadisme en Europe avec Hugo Micheron

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GRÉGORY : Ça fait plaisir de te parler à nouveau. On avait déjà fait un épisode sur le djihadisme. La première question qui me vient naturellement, c’est pourquoi tu publies une nouvelle note aujourd’hui ? Est-ce qu’il y a des raisons particulières pour publier cette nouvelle note ?

HUGO : Salut Greg, merci de me recevoir, c’est un plaisir. Bonjour à toutes et à tous. En fait, je publie ce petit tract dans la collection, c’est un petit feuillet de 60 pages chez Gallimard, dans la collection Tract sur le djihadisme européen et le but, c’est une sorte de note d’étape de mes recherches que j’entreprends depuis deux ans à l’Université de Princeton sur l’histoire du djihadisme européen. Parce qu’en fait, je me suis rendu compte qu’aussi bizarre que ça puisse paraître, il n’y a pas d’histoire du djihadisme européen qui a été écrite et publiée. Et c’est particulièrement surprenant sur un sujet qui est vraiment régulièrement dans l’actu, qui concerne quasiment la totalité des pays européens, qui a des répercussions politiques extrêmement importantes. Quand on se plonge un peu sur l’étude du phénomène et la bibliographie, il y a des livres sur Al-Qaïda en Europe, sur les attentats en Espagne, sur tout un tas de sujets, mais à proprement parler, une histoire du djihadisme européen, on n’en a pas. Et du coup, j’ai entrepris, j’ai un peu utilisé aussi le temps qu’on avait à disposition pendant le Covid, où finalement, le terrain n’était pas possible, à part le terrain virtuel, pour me plonger dans les immenses ressources à ma disposition, à la bibliothèque de Princeton. En puisant dans les sources secondaires, j’ai fini par ressortir un certain nombre d’éléments qui permettaient de mettre les échafaudages ou les premières fondations de cette histoire du djihadisme européen. Et puis là, depuis plusieurs mois maintenant que le terrain rouvre, j’ai l’occasion de faire des entretiens un peu partout en Europe sur le sujet et donc de venir combler et construire l’édifice. On va dire que ce tract en 60 pages, c’est un condensé de ce qu’on peut comprendre de l’étude de l’histoire du djihadisme européen.

GRÉGORY : Est ce que j’ai découvert à la lecture, c’est qu’il y a une vraie différence qui se fait entre les pays en particulier. Alors, il y a cette phrase que tu reprends qui dit “le Danemark ne produit pas de djihadistes”, qui se révèle fausses. Mais il y a un pays comme l’Italie qui en produit assez peu, finalement. Est-ce que tu peux nous expliquer quelles sont les différences ? Parce qu’en France, par exemple, il y a une grosse population en l’occurrence, et est-ce que tu peux nous expliquer pourquoi et comment ça se construit tout ça ?

HUGO : En fait, ce qui est assez intéressant quand on regarde les débats dans les différents pays européens qui sont touchés par le djihadisme, c’est que chaque pays pense que c’est lié à ses spécificités. C’est-à-dire on va en France pour tous les Français qui nous écoutent, les Françaises et Français, spontanément, on va dire ben oui, c’est à cause de la colonisation, éventuellement tout le débat qui va porter autour de la laïcité inclusive ou exclusive, on va regarder du côté du racisme, des discriminations, de la question des banlieues, etc. Mais en Angleterre, finalement, les débats portent sur le système plus communautaire britannique, sur un certain nombre d’éléments, mais vraiment propre au British. En Allemagne, pareil, la question va porter sur la question de l’intégration des populations d’origine turque, au Danemark, où il n’y a pas d’histoire coloniale, le débat porte sur l’identité danoise. En fait, on voit que chacun reformule, selon son propre prisme, des éléments explicatifs. Mais quand on regarde la réalité du phénomène djihadiste, on se rend compte qu’elle est la même dans ces différents pays. Ce sur quoi on va revenir, j’imagine dans un instant, indépendamment des spécificités de chaque pays. Donc moi, c’était le point de départ, j’ai commencé par me dire OK, c’est quoi les chiffres ? Et c’est idiot, mais c’est quand même un point de départ qui est souvent oublié dans le débat public. Donc, en fait, ça donne la chose suivante : si on utilise les départs pour la Syrie et l’Irak au moment du pic de Daech, donc si vous voulez autour de 2014 2015 comme un bon indicateur, on va se rendre compte qu’il y a à peu près 6000 Européens et donc j’inclus encore le Royaume-Uni puisqu’il y était encore, c’était avant le Brexit. Et donc on a 600 Européens qui ont rejoint Daech. En fait, sur ces 6 000, on en a près de 90% qui sont originaires de sept pays. Et ces pays sont quasiment tous des pays d’Europe du Nord-Ouest, donc par volume, on a d’abord la France, qui a 2 000 de ses 6000 Européens. Ensuite, le Royaume-Uni, l’Allemagne, 1 000 chacun. Ensuite, on a la Belgique entre 500 et 600. Après, on a les Pays-Bas, le Danemark, la Suède et on peut rajouter aussi l’Espagne. Donc, tout ça, c’est à peu près 6 000. C’est important déjà de comprendre qu’il y a ce phénomène de concentration en Europe du Nord-Ouest et effectivement, l’Italie, dans ce schéma général, est assez peu représentée. Au total, on a un peu plus d’une centaine d’individus qui étaient résidents en Italie qui ont rejoint Daech. Donc c’est déjà, par exemple, près de deux fois moins que la Suède, alors que la population était beaucoup plus grosse. Et puis, si on veut vraiment que ceux qui ont la nationalité italienne. Alors là, je crois qu’on tombe à une petite dizaine. Donc, en fait, l’exception, elle n’est pas française, l’exception, elle n’est pas danoise, elle n’est pas britannique comme tous les débats publics finissent par le penser ou par le faire croire. L’exception, s’il y en a une en Europe, elle est italienne, et ça, je n’ai pas encore tous les éléments, j’ai des hypothèses, mais je n’ai pas tous les éléments pour l’expliquer. J’ai plus d’éléments pour expliquer la situation dans les autres pays.

GRÉGORY : Ce que tu décris, c’est aussi que le développement, il n’est pas exogène, il est endogène. Ça, c’est un point hyper intéressant parce que je pense que c’est quelque chose qu’on a du mal à comprendre.

HUGO : Oui, encore une fois, dans tous ces débats, il y a un certain nombre d’idées reçues qu’il faut casser pour justement rentrer dans le concret du sujet et s’attaquer, j’ai envie de dire, à la sève de l’explication, toucher la sève de l’explication. Le premier élément, c’est qu’on a tendance à penser que le djihadisme, c’est un phénomène qui est extérieur à l’Europe. Donc typiquement, sa traduction dans le débat public portée par l’extrême droite, c’est le djihadisme, ce sont les migrants ou le djihadisme, ce sont des étrangers qui viennent répandre la haine, etc. La réalité, ce n’est qu’en fait plus ou moins depuis 2001. Depuis le 11 septembre, il y a un mouvement qui s’est développé en Europe et qui a été porté par des Européens. Et c’est toute la spécificité de l’Europe. C’est que désormais, les têtes de gondole jihadistes et les idéologues, etc, sont des individus qui sont nés, qui ont grandi en Europe et qui ont été socialisés en Europe. Et effectivement, le phénomène de fait est endogène et d’autant plus que depuis Daech, depuis 2014/2015, on a atteint des plateaux, on a suffisamment maintenant malheureusement d’activistes pour qu’eux-mêmes soient éventuellement des diffuseurs de cette idéologie. Tout ça, c’est une question de palier en fait. Dans les années 90, il y en avait quelques dizaines, au milieu des années 2000, au moment de la guerre en Irak, on était à quelques centaines et dix ans plus tard, avec l’avènement de Daech, on est à plusieurs milliers. Donc ce sont ces tendances qu’il faut comprendre. Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que le phénomène sur la même période, sur ces trois décennies, il a aussi changé de nature. Et on est passé d’un phénomène jihadiste qui était, au début des années 90, essentiellement porté par des individus qui revenaient d’Afghanistan, qui étaient d’ailleurs pas du tout perçus comme des terroristes. On était avant le 11 septembre. C’étaient des individus qui avaient fait le djihad contre les Soviets en pleine guerre froide, au milieu des années 80, et donc ils avaient trouvé l’exil en Europe, d’ailleurs souvent en Angleterre. Et ils étaient plutôt perçus comme des exilés politiques qui avaient plutôt servi les intérêts de l’Occident parce qu’ils avaient lutté contre l’URSS en Afghanistan. Après le 11 septembre, il y a un changement de regard, et pour cause, certains de ces individus ont diffusé des thèses jihadistes parmi les populations européennes. Mais le changement intervient aussi parce que désormais, ce seront des Européens qui vont porter la chose. Et ça, de ce point de vue là, le 11 septembre, puis la guerre en Irak va créer un mouvement de européanisation, en fait des premiers réseaux qui, à l’époque, c’est toute petite cellule, mais qui vont être actives et qui vont en fait, dans certains cas, réussir à créer des groupes plus larges.

Description de l’épisode

Hugo Micheron est enseignant chercheur à l’université de Princeton aux Etats-Unis et à Science Po, il est l’auteur du Jihadisme français et désormais d’un petit Tract de 60 pages chez Gallimard pour mieux comprendre l’histoire du jihadisme en Europe, les idées reçues mais aussi la réalité de cet extrémisme.
Alors que le procès pour les attentats du Bataclan se prolonge mais qu’en même temps tous les regards sont tournés vers l’Ukraine, on en oublierait presque que ce mouvement grandit dans l’ombre mais grandit sérieusement.
En effet, c’est important, comme va nous l’expliquer Hugo, que le jihadisme, ce ne sont pas seulement des attentats meurtriers, c’est aussi et surtout une idéologie très forte.
Et cela se déconstruit.
Nous passons pas mal de temps à déconstruire tous les clichés autour du Jihadisme sur lesquels surfent les partis d’extrême droite: le grand remplacement, le voile, les musulmans, les migrants…non tout cela n’a rien à voir. Le problème est endogène et très localisé.
D’un autre coté, la stratégie de certaines personnes à gauche qui ont peur d’être taxé de racisme en abordant le sujet sont tout autant un problème car ils ignorent le débat.
Pourtant cette discussion doit avoir lieu de manière sérieuse. Comme le propose Hugo, il faut poser intelligemment les termes du débat.

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Transcription partielle de l’épisode

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GRÉGORY : Ça fait plaisir de te parler à nouveau. On avait déjà fait un épisode sur le djihadisme. La première question qui me vient naturellement, c’est pourquoi tu publies une nouvelle note aujourd’hui ? Est-ce qu’il y a des raisons particulières pour publier cette nouvelle note ?

HUGO : Salut Greg, merci de me recevoir, c’est un plaisir. Bonjour à toutes et à tous. En fait, je publie ce petit tract dans la collection, c’est un petit feuillet de 60 pages chez Gallimard, dans la collection Tract sur le djihadisme européen et le but, c’est une sorte de note d’étape de mes recherches que j’entreprends depuis deux ans à l’Université de Princeton sur l’histoire du djihadisme européen. Parce qu’en fait, je me suis rendu compte qu’aussi bizarre que ça puisse paraître, il n’y a pas d’histoire du djihadisme européen qui a été écrite et publiée. Et c’est particulièrement surprenant sur un sujet qui est vraiment régulièrement dans l’actu, qui concerne quasiment la totalité des pays européens, qui a des répercussions politiques extrêmement importantes. Quand on se plonge un peu sur l’étude du phénomène et la bibliographie, il y a des livres sur Al-Qaïda en Europe, sur les attentats en Espagne, sur tout un tas de sujets, mais à proprement parler, une histoire du djihadisme européen, on n’en a pas. Et du coup, j’ai entrepris, j’ai un peu utilisé aussi le temps qu’on avait à disposition pendant le Covid, où finalement, le terrain n’était pas possible, à part le terrain virtuel, pour me plonger dans les immenses ressources à ma disposition, à la bibliothèque de Princeton. En puisant dans les sources secondaires, j’ai fini par ressortir un certain nombre d’éléments qui permettaient de mettre les échafaudages ou les premières fondations de cette histoire du djihadisme européen. Et puis là, depuis plusieurs mois maintenant que le terrain rouvre, j’ai l’occasion de faire des entretiens un peu partout en Europe sur le sujet et donc de venir combler et construire l’édifice. On va dire que ce tract en 60 pages, c’est un condensé de ce qu’on peut comprendre de l’étude de l’histoire du djihadisme européen.

GRÉGORY : Est ce que j’ai découvert à la lecture, c’est qu’il y a une vraie différence qui se fait entre les pays en particulier. Alors, il y a cette phrase que tu reprends qui dit “le Danemark ne produit pas de djihadistes”, qui se révèle fausses. Mais il y a un pays comme l’Italie qui en produit assez peu, finalement. Est-ce que tu peux nous expliquer quelles sont les différences ? Parce qu’en France, par exemple, il y a une grosse population en l’occurrence, et est-ce que tu peux nous expliquer pourquoi et comment ça se construit tout ça ?

HUGO : En fait, ce qui est assez intéressant quand on regarde les débats dans les différents pays européens qui sont touchés par le djihadisme, c’est que chaque pays pense que c’est lié à ses spécificités. C’est-à-dire on va en France pour tous les Français qui nous écoutent, les Françaises et Français, spontanément, on va dire ben oui, c’est à cause de la colonisation, éventuellement tout le débat qui va porter autour de la laïcité inclusive ou exclusive, on va regarder du côté du racisme, des discriminations, de la question des banlieues, etc. Mais en Angleterre, finalement, les débats portent sur le système plus communautaire britannique, sur un certain nombre d’éléments, mais vraiment propre au British. En Allemagne, pareil, la question va porter sur la question de l’intégration des populations d’origine turque, au Danemark, où il n’y a pas d’histoire coloniale, le débat porte sur l’identité danoise. En fait, on voit que chacun reformule, selon son propre prisme, des éléments explicatifs. Mais quand on regarde la réalité du phénomène djihadiste, on se rend compte qu’elle est la même dans ces différents pays. Ce sur quoi on va revenir, j’imagine dans un instant, indépendamment des spécificités de chaque pays. Donc moi, c’était le point de départ, j’ai commencé par me dire OK, c’est quoi les chiffres ? Et c’est idiot, mais c’est quand même un point de départ qui est souvent oublié dans le débat public. Donc, en fait, ça donne la chose suivante : si on utilise les départs pour la Syrie et l’Irak au moment du pic de Daech, donc si vous voulez autour de 2014 2015 comme un bon indicateur, on va se rendre compte qu’il y a à peu près 6000 Européens et donc j’inclus encore le Royaume-Uni puisqu’il y était encore, c’était avant le Brexit. Et donc on a 600 Européens qui ont rejoint Daech. En fait, sur ces 6 000, on en a près de 90% qui sont originaires de sept pays. Et ces pays sont quasiment tous des pays d’Europe du Nord-Ouest, donc par volume, on a d’abord la France, qui a 2 000 de ses 6000 Européens. Ensuite, le Royaume-Uni, l’Allemagne, 1 000 chacun. Ensuite, on a la Belgique entre 500 et 600. Après, on a les Pays-Bas, le Danemark, la Suède et on peut rajouter aussi l’Espagne. Donc, tout ça, c’est à peu près 6 000. C’est important déjà de comprendre qu’il y a ce phénomène de concentration en Europe du Nord-Ouest et effectivement, l’Italie, dans ce schéma général, est assez peu représentée. Au total, on a un peu plus d’une centaine d’individus qui étaient résidents en Italie qui ont rejoint Daech. Donc c’est déjà, par exemple, près de deux fois moins que la Suède, alors que la population était beaucoup plus grosse. Et puis, si on veut vraiment que ceux qui ont la nationalité italienne. Alors là, je crois qu’on tombe à une petite dizaine. Donc, en fait, l’exception, elle n’est pas française, l’exception, elle n’est pas danoise, elle n’est pas britannique comme tous les débats publics finissent par le penser ou par le faire croire. L’exception, s’il y en a une en Europe, elle est italienne, et ça, je n’ai pas encore tous les éléments, j’ai des hypothèses, mais je n’ai pas tous les éléments pour l’expliquer. J’ai plus d’éléments pour expliquer la situation dans les autres pays.

GRÉGORY : Ce que tu décris, c’est aussi que le développement, il n’est pas exogène, il est endogène. Ça, c’est un point hyper intéressant parce que je pense que c’est quelque chose qu’on a du mal à comprendre.

HUGO : Oui, encore une fois, dans tous ces débats, il y a un certain nombre d’idées reçues qu’il faut casser pour justement rentrer dans le concret du sujet et s’attaquer, j’ai envie de dire, à la sève de l’explication, toucher la sève de l’explication. Le premier élément, c’est qu’on a tendance à penser que le djihadisme, c’est un phénomène qui est extérieur à l’Europe. Donc typiquement, sa traduction dans le débat public portée par l’extrême droite, c’est le djihadisme, ce sont les migrants ou le djihadisme, ce sont des étrangers qui viennent répandre la haine, etc. La réalité, ce n’est qu’en fait plus ou moins depuis 2001. Depuis le 11 septembre, il y a un mouvement qui s’est développé en Europe et qui a été porté par des Européens. Et c’est toute la spécificité de l’Europe. C’est que désormais, les têtes de gondole jihadistes et les idéologues, etc, sont des individus qui sont nés, qui ont grandi en Europe et qui ont été socialisés en Europe. Et effectivement, le phénomène de fait est endogène et d’autant plus que depuis Daech, depuis 2014/2015, on a atteint des plateaux, on a suffisamment maintenant malheureusement d’activistes pour qu’eux-mêmes soient éventuellement des diffuseurs de cette idéologie. Tout ça, c’est une question de palier en fait. Dans les années 90, il y en avait quelques dizaines, au milieu des années 2000, au moment de la guerre en Irak, on était à quelques centaines et dix ans plus tard, avec l’avènement de Daech, on est à plusieurs milliers. Donc ce sont ces tendances qu’il faut comprendre. Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que le phénomène sur la même période, sur ces trois décennies, il a aussi changé de nature. Et on est passé d’un phénomène jihadiste qui était, au début des années 90, essentiellement porté par des individus qui revenaient d’Afghanistan, qui étaient d’ailleurs pas du tout perçus comme des terroristes. On était avant le 11 septembre. C’étaient des individus qui avaient fait le djihad contre les Soviets en pleine guerre froide, au milieu des années 80, et donc ils avaient trouvé l’exil en Europe, d’ailleurs souvent en Angleterre. Et ils étaient plutôt perçus comme des exilés politiques qui avaient plutôt servi les intérêts de l’Occident parce qu’ils avaient lutté contre l’URSS en Afghanistan. Après le 11 septembre, il y a un changement de regard, et pour cause, certains de ces individus ont diffusé des thèses jihadistes parmi les populations européennes. Mais le changement intervient aussi parce que désormais, ce seront des Européens qui vont porter la chose. Et ça, de ce point de vue là, le 11 septembre, puis la guerre en Irak va créer un mouvement de européanisation, en fait des premiers réseaux qui, à l’époque, c’est toute petite cellule, mais qui vont être actives et qui vont en fait, dans certains cas, réussir à créer des groupes plus larges.

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