#157 Débuter 2021 de manière positive

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GRÉGORY : On va parler aujourd’hui de crise systémique. On va parler de la manière dont on est en train d’évoluer, mais on va aussi parler du futur. On est tout début 2021, comment vous avez vécu cette année 2020 et cette crise sanitaire ?

DANIEL : D’abord tout en travaillant sur le futur. Je l’ai vécu comme tout le monde. Donc comme malgré tout comme un événement non anticipé, inattendu, y compris dans sa longueur. C’est-à-dire que l’idée du confinement du tiers de l’humanité, c’était déjà une idée surprenante, aussi soudaine. L’idée qu’un an plus tard, ça continue, vraisemblablement, en est une autre. Après pour être honnête, c’est une année qui s’est avéré être une bonne année pour le travail que je faisais, pour le développement du réseau d’universités, de la pluralité, tellement petit qu’il pouvait difficilement souffrir d’une crise et n’y avait pas d’acquis. Mais en fait, tout en ayant comme tout le monde marre des visioconférences, on s’est quand même amusé à inventer toutes sortes de formats. On a fait des ateliers de collecte de morceaux d’imaginaire, on a fait des ateliers d’écriture passionnants avec des écrivains, des écrivaines de science-fiction et des gens qui n’en avaient pas du tout l’expérience dans le cadre de projets, on a inventé une formule de publication faite de bric et de broc qui avec des contributions venues du monde entier. Donc bon, ce n’est pas pour ça qu’on a envie que ça dure. Puis après, c’était aussi une année dont j’avais lu des bouts dans pas mal de romans de science-fiction. Je n’en ai plus forcément les titres ici. Donc, quelque part, c’est un peu comme si des choses se traduisait de la fiction à dans la réalité. Ça ne m’intéresse pas du tout de savoir si la fiction a prévu quoi que ce soit, mais par contre, ce qui était intéressant, c’est que peut être du coup, ça a aidé à être un tout petit peu plus armé pour que ce soit un élément de contexte.

GRÉGORY : Il y a Utopia, entre autres, qui est un livre de science-fiction qui a été écrit il y a une trentaine d’années, je crois de mémoire, et qui décrit globalement la situation dans laquelle on est aujourd’hui. C’est vrai qu’il y a pas mal de gens qui y sont retournés l’année dernière à cette lecture. C’est vrai que la science-fiction c’est toujours intéressant parce que ce sont des récits. Moi, j’ai la sensation, mais peut-être que je me trompe, qu’on va vivre pas mal de crises parallèles, en tout cas que cette crise sanitaire va générer une crise économique, une crise sociale, qu’on va avoir une crise politique l’année prochaine. On parle et on voit la montée du bitcoin, entre autres, sans doute une crise financière du coup, et évidemment par-dessus tout ça, une crise écologique, puis aussi une crise paradigmatique, donc une crise des croyances. Parce que justement les gens sont en manque de récit, en particulier dans un monde où on parle d’écologie, on parle beaucoup d’écologie punitive et les gens ne savent plus très bien à quel récit se vouer, si on peut dire ça comme ça, comment vous voyez les choses sur les années à venir ?

DANIEL : Il y a beaucoup, beaucoup de choses dans ce que vous venez de dire, donc il faudra peut-être qu’on le, qu’on en parle petit à petit.  Mais pour revenir d’abord à cette question de crise, ce qu’on voit un peu, se travailler un peu partout, c’est l’idée que ce n’est pas une crise, au sens en tout cas où il y aurait une situation normale sans crise à laquelle revenir. Ce n’est pas pour ça que c’est seulement une conjonction de crises. C’est peut-être autre chose ce que peut-être Timothy North appellerait un méta objet, c’est-à-dire, un objet qui est tellement gros que d’essayer de l’appréhender avec les notions un peu précises, cette idée de crise, même quand on dit non, mais la crise, c’est aussi une métamorphose, pour dédramatiser, par exemple on dit le changement climatique ce n’est pas une crise, c’est une transformation des conditions même de la vie, ça ne s’appelle pas une crise, c’est autre chose. Une crise financière, ça peut s’appeler une crise. Donc ce qu’on voit pas mal émerger, c’est effectivement l’idée que dans un horizon visible, il n’y a vraisemblablement pas de périodes sans crise, de périodes de non-crises, au sens en tout cas, où on est aux crises avec des phénomènes qui ne sont pas tous anticipables et qui tous cassent les mécanismes de la vie économique ou sociale normale, enfin considérer auparavant comme normale. Donc, on ne sortira pas de la crise, qu’il faut s’habituer à être dans une période de bouleversements, de questionnements, d’incertitudes, d’incertitudes structurelles. Il y a même un institut des temps normaux qui s’est créé autour de cette idée-là qu’il y a justement plus de normalité vers laquelle se tourner et qu’on est dans une période, comme aucune période n’est éternelle, mais qui est au moins durablement complexe, chaotique, contradictoire, et qu’il faut apprendre à travailler dans cette réalité, on ne fait pas ni des affaires, ni des politiques publiques de la même manière dans un monde de ce type-là que dans un monde plus déterministe dans lequel, voilà, quand il y a une crise, c’est une période, elle a un début, et elle a une fin. La deuxième chose sur laquelle, par exemple, les assureurs travaillent, c’est l’idée que cette période-là, en plus, est marquée par le fait que du coup, une crise n’arrive jamais seule ou rarement seule, soit parce qu’elles sont toutes connectées. Si le changement climatique s’accélère et ses conséquences se font ressentir de plus en plus vivement. Évidemment, cela a des conséquences sur la vie économique, donc sur les finances. Mais ce sont aussi des conséquences sur l’esprit public et pour moi, d’une certaine manière, beaucoup de ces crispations aujourd’hui identitaires ou sociales sont liées au fait que, petit à petit, la question climatique commence à mordre pour de vrai et que du coup, il commence à y avoir des tentatives politiques pour essayer de dire bon, il faudrait quand même qu’on bouge un peu plus et que du coup, ça déstabilise beaucoup plus, à la fois les situations acquises, mais aussi la manière dont les gens pouvaient se percevoir, percevoir leurs perspectives. Ça peut créer clairement aussi des inégalités. Il y a des gens pour lesquels, c’est plus facile de concevoir des changements que pour d’autres.

La suite a écouté sur VLAN !

Description de l’épisode

J’aurais peut être du commencer l’année avec cet épisode! Je reçois Daniel Kaplan qui est le cofondateur de l’université de la pluralité. Anciennement figure emblématique du numérique en France, depuis plusieurs années il consacre son énergie à connecter les individus et les organisations pour développer des imaginaires désirables pour le futur. Qu’ils soient artistes, auteur.e.s, designer, utopiste, chercheur.seuses ou autre.

Avec Daniel nous parlons de cette année 2020 qui a été difficile pour de très nombreux d’entres nous et une année 2021 qui commence sur les chapeaux de roue mais dans une atmosphère plutôt maussade avec comme seule ligne de mire l’effondrement de notre système voire de la vie.
Dès lors, comment résister? Comment envisager un futur positif et désirable.
Comment sourire à 2021? Ce sont des questions essentielles je crois car nous avons tous besoin de nous remonter le moral chacun et chacune.
C’est exactement le but de cet épisode qui, sans être nécessairement déconnecté de la réalité, nous permet de nous poser des questions centrales, de remettre en question l’ordre établi voire de questionner l’inquestionnable.
J’ai toujours beaucoup d’intérêt pour cette manière de réfléchir car ce sont, in fine, les questions les plus importantes, les plus essentielles je crois.
Cet épisode fait beaucoup d’écho avec lui que j’avais enregistré il y a 2 ans avec le sociologue Michael Dandrieux disponible ici: pourquoi vivons nous dans une société en défaillance?

Je vous invite donc à écouter cet épisode avec le coeur et l’esprit ouvert. Il devrait vous faire du bien et générer des conversations passionnantes avec vos proches.
Après tout avec ce couvre feu à 18h que peut on faire d’autres que discuter?

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Transcription partielle de l’épisode

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GRÉGORY : On va parler aujourd’hui de crise systémique. On va parler de la manière dont on est en train d’évoluer, mais on va aussi parler du futur. On est tout début 2021, comment vous avez vécu cette année 2020 et cette crise sanitaire ?

DANIEL : D’abord tout en travaillant sur le futur. Je l’ai vécu comme tout le monde. Donc comme malgré tout comme un événement non anticipé, inattendu, y compris dans sa longueur. C’est-à-dire que l’idée du confinement du tiers de l’humanité, c’était déjà une idée surprenante, aussi soudaine. L’idée qu’un an plus tard, ça continue, vraisemblablement, en est une autre. Après pour être honnête, c’est une année qui s’est avéré être une bonne année pour le travail que je faisais, pour le développement du réseau d’universités, de la pluralité, tellement petit qu’il pouvait difficilement souffrir d’une crise et n’y avait pas d’acquis. Mais en fait, tout en ayant comme tout le monde marre des visioconférences, on s’est quand même amusé à inventer toutes sortes de formats. On a fait des ateliers de collecte de morceaux d’imaginaire, on a fait des ateliers d’écriture passionnants avec des écrivains, des écrivaines de science-fiction et des gens qui n’en avaient pas du tout l’expérience dans le cadre de projets, on a inventé une formule de publication faite de bric et de broc qui avec des contributions venues du monde entier. Donc bon, ce n’est pas pour ça qu’on a envie que ça dure. Puis après, c’était aussi une année dont j’avais lu des bouts dans pas mal de romans de science-fiction. Je n’en ai plus forcément les titres ici. Donc, quelque part, c’est un peu comme si des choses se traduisait de la fiction à dans la réalité. Ça ne m’intéresse pas du tout de savoir si la fiction a prévu quoi que ce soit, mais par contre, ce qui était intéressant, c’est que peut être du coup, ça a aidé à être un tout petit peu plus armé pour que ce soit un élément de contexte.

GRÉGORY : Il y a Utopia, entre autres, qui est un livre de science-fiction qui a été écrit il y a une trentaine d’années, je crois de mémoire, et qui décrit globalement la situation dans laquelle on est aujourd’hui. C’est vrai qu’il y a pas mal de gens qui y sont retournés l’année dernière à cette lecture. C’est vrai que la science-fiction c’est toujours intéressant parce que ce sont des récits. Moi, j’ai la sensation, mais peut-être que je me trompe, qu’on va vivre pas mal de crises parallèles, en tout cas que cette crise sanitaire va générer une crise économique, une crise sociale, qu’on va avoir une crise politique l’année prochaine. On parle et on voit la montée du bitcoin, entre autres, sans doute une crise financière du coup, et évidemment par-dessus tout ça, une crise écologique, puis aussi une crise paradigmatique, donc une crise des croyances. Parce que justement les gens sont en manque de récit, en particulier dans un monde où on parle d’écologie, on parle beaucoup d’écologie punitive et les gens ne savent plus très bien à quel récit se vouer, si on peut dire ça comme ça, comment vous voyez les choses sur les années à venir ?

DANIEL : Il y a beaucoup, beaucoup de choses dans ce que vous venez de dire, donc il faudra peut-être qu’on le, qu’on en parle petit à petit.  Mais pour revenir d’abord à cette question de crise, ce qu’on voit un peu, se travailler un peu partout, c’est l’idée que ce n’est pas une crise, au sens en tout cas où il y aurait une situation normale sans crise à laquelle revenir. Ce n’est pas pour ça que c’est seulement une conjonction de crises. C’est peut-être autre chose ce que peut-être Timothy North appellerait un méta objet, c’est-à-dire, un objet qui est tellement gros que d’essayer de l’appréhender avec les notions un peu précises, cette idée de crise, même quand on dit non, mais la crise, c’est aussi une métamorphose, pour dédramatiser, par exemple on dit le changement climatique ce n’est pas une crise, c’est une transformation des conditions même de la vie, ça ne s’appelle pas une crise, c’est autre chose. Une crise financière, ça peut s’appeler une crise. Donc ce qu’on voit pas mal émerger, c’est effectivement l’idée que dans un horizon visible, il n’y a vraisemblablement pas de périodes sans crise, de périodes de non-crises, au sens en tout cas, où on est aux crises avec des phénomènes qui ne sont pas tous anticipables et qui tous cassent les mécanismes de la vie économique ou sociale normale, enfin considérer auparavant comme normale. Donc, on ne sortira pas de la crise, qu’il faut s’habituer à être dans une période de bouleversements, de questionnements, d’incertitudes, d’incertitudes structurelles. Il y a même un institut des temps normaux qui s’est créé autour de cette idée-là qu’il y a justement plus de normalité vers laquelle se tourner et qu’on est dans une période, comme aucune période n’est éternelle, mais qui est au moins durablement complexe, chaotique, contradictoire, et qu’il faut apprendre à travailler dans cette réalité, on ne fait pas ni des affaires, ni des politiques publiques de la même manière dans un monde de ce type-là que dans un monde plus déterministe dans lequel, voilà, quand il y a une crise, c’est une période, elle a un début, et elle a une fin. La deuxième chose sur laquelle, par exemple, les assureurs travaillent, c’est l’idée que cette période-là, en plus, est marquée par le fait que du coup, une crise n’arrive jamais seule ou rarement seule, soit parce qu’elles sont toutes connectées. Si le changement climatique s’accélère et ses conséquences se font ressentir de plus en plus vivement. Évidemment, cela a des conséquences sur la vie économique, donc sur les finances. Mais ce sont aussi des conséquences sur l’esprit public et pour moi, d’une certaine manière, beaucoup de ces crispations aujourd’hui identitaires ou sociales sont liées au fait que, petit à petit, la question climatique commence à mordre pour de vrai et que du coup, il commence à y avoir des tentatives politiques pour essayer de dire bon, il faudrait quand même qu’on bouge un peu plus et que du coup, ça déstabilise beaucoup plus, à la fois les situations acquises, mais aussi la manière dont les gens pouvaient se percevoir, percevoir leurs perspectives. Ça peut créer clairement aussi des inégalités. Il y a des gens pour lesquels, c’est plus facile de concevoir des changements que pour d’autres.

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