#136 Claquer la porte au « ghosting » avec Malene Rydahl

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GRÉGORY : On va parler de réponses et non-réponses dans une période post confinement où on s’est beaucoup plain de la distanciation sociale, du fait d’être loin des autres, d’être parfois seul chez soi. Toi, ton livre, tu l’as écrit l’an passé, il est sorti juste avant le confinement, mais tu t’es vraiment intéressé à cette distanciation sociale, liée sans doute aux outils numériques. Pourquoi tu t’es intéressé à la non-réponse ou à la manière dont les gens répondent aux messages aujourd’hui ?

MALENE : Mon sujet principal, c’est le bien-être, c’est le bonheur des gens. Il se trouve que l’élément principal ou qui a le plus d’influence, c’est la qualité de nos relations. Aujourd’hui, comme nos relations sont de plus en plus digitales, j’ai regardé ce qui se passe là-dedans parce qu’en fait, on n’a bizarrement pas vraiment établi de règles. Il y a des règles quand on se voit, l’éducation, etc, mais c’est comme si dans l’ère digitale ou dans la sphère digitale, il n’y a pas vraiment de règles. Donc il y a énormément de malentendus, des incompréhensions et même des conflits. À un moment donné, j’ai commencé à observer, en réalité, c’était suite à mon départ de l’hôtellerie, j’étais dans une carrière plutôt corporate et donc les gens m’ont dit : tu vas voir, tu n’auras plus aucune réponse, mais moi, j’avais plutôt des réponses parce que je n’écrivais pas à des gens auxquels je ne m’attendais pas des réponses. Mais il y avait quand même quelques personnes, en particulier une personne avec qui on avait eu des relations assez soutenues, qui ne m’a plus jamais répondu. J’ai observé chez moi ce que ça avait déclenché, alors que je ne suis pas particulièrement susceptible, mais au début, je me suis dit, c’est bizarre, peut-être, elle ne l’a pas eue, etc, et ça a déclenché, à un moment donné, un sentiment de doute et du coup, ça fait appel à notre imaginaire, “peut-être que c’est parce que je n’ai plus mon poste”, “j’ai dû faire quelque chose de mal”, etc, et j’ai fini par la juger. Je me suis dit qu’avec la multiplication des messages qu’on reçoit et des gens qui sont plus susceptibles, ça crée forcément des frustrations et du mal-être. Comme il n’y avait pas de data, j’ai décidé de faire une grande étude dans le monde.

GRÉGORY : Tu as fait une étude sur 6 pays sur 3000 personnes pour essayer de comprendre comment les gens réagissent, agissent à ces réponses/ non-réponses. Moi, j’ai la sensation qu’il y a des sortes de règles non dites, avec l’arrivée des WhatsApp, des DM, que ce soit sur Instagram ou Twitter ou Facebook, alors il y a ça aussi. Il y a une multiplication des canaux. Après, on les utilise, on ne les utilise pas, mais ça peut être LinkedIn, les emails perso/pro, Facebook, Instagram, SMS ou WhatsApp,  TikTok, etc. Ça peut être tellement de réseaux différents que du coup, ça devient compliqué, on ne sait plus très bien où est ce qu’on a communiqué. Mais moi, j’ai pensé qu’il y a une sorte de hiérarchisation qui s’est passée, je me souviens quand j’étais jeune, ça remonte, je passais des heures au téléphone. Aujourd’hui, pour appeler quelqu’un, c’est une étape, c’est-à-dire qu’en fait, au début, on envoie un message WhatsApp et le WhatsApp, c’est pas exactement la même chose que le SMS quasiment. L’appel, c’est vraiment le Graal, c’est genre “je me permets de t’appeler quoi”.

MALENE : En tout cas, dans les interviews et dans le sondage, c’est générationnel, parce que les jeunes, d’une très grande majorité, trouvent que c’est une agression, l’appel téléphonique. Ils préfèrent vraiment ce qu’ils appellent le “voice”, on enregistre ce message qui va disparaître après, mais ils n’aiment pas du tout le coup de fil comme avant.

GRÉGORY : C’est vrai qu’il y a aussi une montée des messages vocaux. Moi, j’en fais plein régulièrement, souvent quand je n’ai pas le temps.

MALENE : Justement, quand on est en conversation, ce qu’on appelle les messages instantanés, il y a une imitation de la conversation, sauf qu’il n’y a pas les expressions. Un message écrit peut très bien être mal interprété. Avec les vocaux, on peut mettre un peu plus de tons ou de forme, etc, on peut se reprendre, on peut dire une phrase et dire non finalement, je rigole, on peut mettre de la vie, de l’esprit, donc ça nuance plus.

GRÉGORY : C’est marrant parce qu’on avait cette synchronicité, et la conversation, c’est une synchronicité, les deux sont présents au même moment, et là, on est dans des messages asynchrones. Mais parfois, ce qui est étonnant, c’est que les conversations, ça peut être de messages vocaux à messages vocaux, donc il y a une synchronicité puisque les deux sont là, et pourtant il ne s’appelle pas.

MALENE : Ça, c’est encore autre chose, il faut comprendre quel est le système de l’autre. Les gens ne se posent pas non plus la question quel est leur système de réponse et leurs préférences. Par exemple, je crois que tu m’as contacté sur LinkedIn, il se trouve que moi, c’est un média que j’utilise. Je réponds systématiquement sur LinkedIn. Nous, on se connaît par une amie, donc je t’ai répondu, mais je réponds systématiquement aux gens. J réponds beaucoup moins sur les autres médias sociaux parce que je n’y vais pas beaucoup. Mais mon système est clair, donc je ne me laisse pas envahir par les messages parce que c’est clair pour moi, là où je réponds et là où je ne réponds pas, je n’ai pas non plus du mal avec le “non”. Le problème, quand on ne veut pas dire non, ce sont les relances, si on ne dit pas non tout de suite, même si on peut dire, ce n’est pas poli, c’est très bien. En tout cas, les gens ne vont pas relancer. Dans la masse de messages qu’on reçoit, on peut mettre en place des systèmes qui font qu’on n’est pas stressé et on ne culpabilise pas parce que c’est clair.

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Description de l’épisode

Malene Rydahl est autrice, executive coach et vient de publier «je te réponds, moi non plus» aux éditions Flammarions. Il est difficile d’ignorer qu’avec la multiplications des réseaux sociaux et des messageries liées, nous avons une charge mentale augmentée qui nous entraine parfois à la non réponse, au «ghosting». On a tous plus ou moins pratiqué ou subit ce phénomène qui est particulièrement pénible.
Avec Malène nous revenons sur les dynamiques d’échange sur les reseaux sociaux et comme elle a fait une étude internationale pour écrire son livre, nous regardons également les différences de dynamiques relationnelles en fonction des différents pays.

Nous revenons aussi sur notre volonté d’être aimé et donc parfois de faire des semi réponse pour ne pas blesser

Un épisode ancré dans notre quotidien qui me fait dire que pour les messages aussi parfois le «slow» est une bonne manière de gérer car personne n’aime être ghosté ou les réponses qui n’en s’en pas.

Malène invite à réfléchir à notre profil de répondant également.

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Transcription partielle de l’épisode

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GRÉGORY : On va parler de réponses et non-réponses dans une période post confinement où on s’est beaucoup plain de la distanciation sociale, du fait d’être loin des autres, d’être parfois seul chez soi. Toi, ton livre, tu l’as écrit l’an passé, il est sorti juste avant le confinement, mais tu t’es vraiment intéressé à cette distanciation sociale, liée sans doute aux outils numériques. Pourquoi tu t’es intéressé à la non-réponse ou à la manière dont les gens répondent aux messages aujourd’hui ?

MALENE : Mon sujet principal, c’est le bien-être, c’est le bonheur des gens. Il se trouve que l’élément principal ou qui a le plus d’influence, c’est la qualité de nos relations. Aujourd’hui, comme nos relations sont de plus en plus digitales, j’ai regardé ce qui se passe là-dedans parce qu’en fait, on n’a bizarrement pas vraiment établi de règles. Il y a des règles quand on se voit, l’éducation, etc, mais c’est comme si dans l’ère digitale ou dans la sphère digitale, il n’y a pas vraiment de règles. Donc il y a énormément de malentendus, des incompréhensions et même des conflits. À un moment donné, j’ai commencé à observer, en réalité, c’était suite à mon départ de l’hôtellerie, j’étais dans une carrière plutôt corporate et donc les gens m’ont dit : tu vas voir, tu n’auras plus aucune réponse, mais moi, j’avais plutôt des réponses parce que je n’écrivais pas à des gens auxquels je ne m’attendais pas des réponses. Mais il y avait quand même quelques personnes, en particulier une personne avec qui on avait eu des relations assez soutenues, qui ne m’a plus jamais répondu. J’ai observé chez moi ce que ça avait déclenché, alors que je ne suis pas particulièrement susceptible, mais au début, je me suis dit, c’est bizarre, peut-être, elle ne l’a pas eue, etc, et ça a déclenché, à un moment donné, un sentiment de doute et du coup, ça fait appel à notre imaginaire, “peut-être que c’est parce que je n’ai plus mon poste”, “j’ai dû faire quelque chose de mal”, etc, et j’ai fini par la juger. Je me suis dit qu’avec la multiplication des messages qu’on reçoit et des gens qui sont plus susceptibles, ça crée forcément des frustrations et du mal-être. Comme il n’y avait pas de data, j’ai décidé de faire une grande étude dans le monde.

GRÉGORY : Tu as fait une étude sur 6 pays sur 3000 personnes pour essayer de comprendre comment les gens réagissent, agissent à ces réponses/ non-réponses. Moi, j’ai la sensation qu’il y a des sortes de règles non dites, avec l’arrivée des WhatsApp, des DM, que ce soit sur Instagram ou Twitter ou Facebook, alors il y a ça aussi. Il y a une multiplication des canaux. Après, on les utilise, on ne les utilise pas, mais ça peut être LinkedIn, les emails perso/pro, Facebook, Instagram, SMS ou WhatsApp,  TikTok, etc. Ça peut être tellement de réseaux différents que du coup, ça devient compliqué, on ne sait plus très bien où est ce qu’on a communiqué. Mais moi, j’ai pensé qu’il y a une sorte de hiérarchisation qui s’est passée, je me souviens quand j’étais jeune, ça remonte, je passais des heures au téléphone. Aujourd’hui, pour appeler quelqu’un, c’est une étape, c’est-à-dire qu’en fait, au début, on envoie un message WhatsApp et le WhatsApp, c’est pas exactement la même chose que le SMS quasiment. L’appel, c’est vraiment le Graal, c’est genre “je me permets de t’appeler quoi”.

MALENE : En tout cas, dans les interviews et dans le sondage, c’est générationnel, parce que les jeunes, d’une très grande majorité, trouvent que c’est une agression, l’appel téléphonique. Ils préfèrent vraiment ce qu’ils appellent le “voice”, on enregistre ce message qui va disparaître après, mais ils n’aiment pas du tout le coup de fil comme avant.

GRÉGORY : C’est vrai qu’il y a aussi une montée des messages vocaux. Moi, j’en fais plein régulièrement, souvent quand je n’ai pas le temps.

MALENE : Justement, quand on est en conversation, ce qu’on appelle les messages instantanés, il y a une imitation de la conversation, sauf qu’il n’y a pas les expressions. Un message écrit peut très bien être mal interprété. Avec les vocaux, on peut mettre un peu plus de tons ou de forme, etc, on peut se reprendre, on peut dire une phrase et dire non finalement, je rigole, on peut mettre de la vie, de l’esprit, donc ça nuance plus.

GRÉGORY : C’est marrant parce qu’on avait cette synchronicité, et la conversation, c’est une synchronicité, les deux sont présents au même moment, et là, on est dans des messages asynchrones. Mais parfois, ce qui est étonnant, c’est que les conversations, ça peut être de messages vocaux à messages vocaux, donc il y a une synchronicité puisque les deux sont là, et pourtant il ne s’appelle pas.

MALENE : Ça, c’est encore autre chose, il faut comprendre quel est le système de l’autre. Les gens ne se posent pas non plus la question quel est leur système de réponse et leurs préférences. Par exemple, je crois que tu m’as contacté sur LinkedIn, il se trouve que moi, c’est un média que j’utilise. Je réponds systématiquement sur LinkedIn. Nous, on se connaît par une amie, donc je t’ai répondu, mais je réponds systématiquement aux gens. J réponds beaucoup moins sur les autres médias sociaux parce que je n’y vais pas beaucoup. Mais mon système est clair, donc je ne me laisse pas envahir par les messages parce que c’est clair pour moi, là où je réponds et là où je ne réponds pas, je n’ai pas non plus du mal avec le “non”. Le problème, quand on ne veut pas dire non, ce sont les relances, si on ne dit pas non tout de suite, même si on peut dire, ce n’est pas poli, c’est très bien. En tout cas, les gens ne vont pas relancer. Dans la masse de messages qu’on reçoit, on peut mettre en place des systèmes qui font qu’on n’est pas stressé et on ne culpabilise pas parce que c’est clair.

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